La pilule en Islam!

[Cheikhna Mouhamed WAGUE]

Bonjour soonikanlenmu

Je m’en vais vous dire ce dont je sais sur cette question à laquelle il n’est d’ailleurs pas du tout aisé de répondre. Mais, je ne suis pas sûr d’en savoir plus que vous. Tout ce dont je suis sûr c’est que la réponse à cette question doit provenir, au regard de l’islam, d’un raisonnement par analogie, quand on sait que la question n’a pas été directement évoquée auparavant. Mais malheureusement, les Oulémas de l’Islam ne sont pas unanimes sur la question.

Les uns, à l’image du très catholique Pape Jean Paule II, s’opposent mordicus au port du préservatif, et cela quels que soient les motifs évoqués. Les autres, plus tolérants et plus lucides à mon humble sens, disent qu’en cas de nécessité et dans le cadre d’une union légale, on peut recourir à cette pratique. Je suis plus en phase avec ces derniers, car ils fondent leur argumentaire sur une pratique antéislamique que l’Islam n’a pas interdit. Je m’explique. Dans l’Arabie antéislamique, beaucoup d’esclavagistes couchaient avec leurs esclaves et au moment de l’éjaculation, ils se retiraient pour éjaculer ailleurs. Cette pratique a continué d’exister, au sein des couples, même avec l’avènement de l’Islam, histoire d’éviter les grossesses rapprochées. Djabir Ibn Abd Allah, dans un de ses hadiths, affirme que : « Nous pratiquons le coït interrompu du vivant du Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) et quand il était mis au courant, il ne nous l’a pas interdit ». Par analogie à cette pratique, certains Oulémas disent avec force d'arguments d'ailleurs que si c’est pour le bien-être des enfants et pour la santé de la mère, il est possible de procéder au port du préservatif qui est similaire à l’éjaculation dans le vide. Aucun inconvénient à cet égard alors. On l’aura donc compris, en cas de peur pour la santé des enfants et de la mère, on peut recourir valablement, mais raisonnablement, à la contraception et / ou au port du préservatif. N’a-t-on d’ailleurs pas lu dans la Sourate Al-Baqarah (la Vache) que : « Allah n’impose à l’âme humaine que ce qu’elle peut supporter ». « La youkalifou Lâhou nafssane illa wousse ahâ ». A la lumière de cette phrase divine, on n’est en droit de conclure que quand on se rend compte que les naissances rapprochées hypothèquent dangereusement la croissance des enfants ou nuisent à la santé de la mère, on n’est obligé de se soustraire à de tels ennuis. A ce sujet, donnons aussi la parole à Samba Traoré, un éminent juriste soninké basé actuellement à l'Université Gaston Berger du Sénégal: " Ceci s'explique par le fait d'abord qu'il faut espacer les naissances, ensuite éviter que l'enfant, qui doit téter le sein de sa mère pendant 18 à 24 mois, ne prenne du lait déjà gâté du fait d'une autre grossesse, ce qui peut provoquer une maladie particulièrement cause de mortalité infantile, le kwashiorkor, appellé bodo en soninké".

Je m’en vais aussi ajouter à mon raisonnement qu’il va de soi qu’une personne qui se sait malade des maladies sexuellement transmissibles n’a pas droit de faire un commerce sexuel sans se protéger. Si jamais elle transmettait volontairement cette maladie à son partenaire, elle n'est rien de moins qu'un assassin. Rien ne justifie un tel acte au regard de l'Islam. Nous n'avons pas droit de transmettre une maladie à une personne, au prétexte que c'est notre femme ou c'est notre époux. Quand on est malade, on se protège et on protège les autres. C'est la moindre des choses. Le contraire ne peut être que reprouvé par l'Islam, une religion d'altruisme et de bienfaisance.

En revanche, il est clair que le meilleur de tous les hommes, le Prophète Muhammad, alayhi salâtou wa salâmou, nous a ardemment incité à la procréation pour que les membres de sa communauté dépassent largement en nombre celles des autres prophètes le jour du jugement dernier. Il nous dit: "Mariez-vous, vous vous multiplierez; et au jour de la Résurrection, je tirerai fierté de votre grand nombre devant les autres communautés, y compris de l'enfant mort-né." L’usage abusif et sans motif valable du préservatif ou de la contraception ne doit donc pas être fait par un bon musulman. On doit donc garder mesure. Que les couples qui refusent de faire des enfants pour on ne sait quelle raison, en recourant à de tels procédés, sachent qu’ils s’inscrivent en faux contre les valeurs édictées par l’Islam, ce qui est gravissime. Nombreux sont malheureusement aujourd’hui ceux qui ne veulent presque plus faire des enfants pour des motifs fallacieux et irrecevables au regard de la rationalité islamique.

Quant à l’avortement, il est toujours et partout interdit par l’Islam. C’est une bévue grave que de mettre gratuitement terme à une grossesse, qu'elle soit issue d'une union légale ou non . Je dis gratuitement, parce qu’on peut être obligé de recourir à cette pratique quand la grossesse expose la vie de la mère à un danger imminent. Les autres motifs ne sont pas valables, même si l’enfant à naître est mal formé (handicapé). Je n'ai dit rien au hasard, car j'ai connu des femmes qui, à la suite de l'échographie, décident de se faire avorter parce que le médecin leur a dit que l'enfant à naitre est un handicapé. Un handicapé a droit à la vie. Dieu a dit dans le Coran, précisément dans la sourate an-nour (la lumière), " Yakhloukhou Lâhou Ma yachâ'ou", c'est-à-dire: " Allah crée ce qu'Il veut" et dans l'état qu'Il le souhaite.

Pour clore, je me dois de signaler que tout ce qui a été dit n’engage que moi. J’assume le contenu du texte. Il va sans dire que je suis le seul comptable des erreurs d’interprétations qu’il pourrait contenir. Toutes les critiques constructives sont en ce sens les bienvenues. A chacun de faire cependant la part des choses. Qu’Allah, grâce à sa science sans bornes, nous guide toujours et partout vers le droit chemin. Ainsi soit-il !
Bien cordialement