Le Basunde consiste à immoler un mouton, un bœuf ou une chèvre pour accueillir un digne fils ou ami qui vient de l’étranger ou d’un autre village lointain, généralement après une longue période d’absence. On parle aussi de Basunde quand on organise un repas pour le retour d'un père, mère ou tante de la Mecque. La visite d’une personne importante fait aussi l’objet de Basunde.
En effet, depuis longtemps, les Soninkés ont le sens de l’hospitalité et ils la démontrent à chaque fois que l’occasion se présente. En ce sens, le Basunde fait partie du patrimoine socioculturel soninké.
Il est de notoriété que le fait de voyager pour réussir est une étape presque culturelle, une initiation chez les jeunes Soninkés. D'ailleurs, le Soninké est connu pour son goût de « chasseur d'horizons cléments ». Autant les Soninkés voyagent beaucoup, autant ils oublient rarement de retourner au bercail à chaque fois que le temps et les ressources le leur permettent. Et comme le dit Youssou N’dour :" Diom moy touki fouleu moy gnibissé". C'est-à-dire " C'est le courage qui voyage mais c'est le vergogne qui retourne à la maison". Ainsi, tout retour au bercail est un événement significatif dans la famille d'origine.
Que l'on soit Soninké de Pointe Noire, Abidjan, Paris, Philadelphie, Dakar ou n'importe quelle localité , on ne pense qu' à une chose : s'enrichir et retourner un jour auprès de sa famille. C'est ainsi que dans les villages, il est fréquent d'entendre des " Douas " du genre : " Allah gandi o do goundounko sire koy me": Puisse Allah faire que nous revoyons nos expatriés dans de meilleures conditions. Nous devinons par là que la famille du village ne pense qu'aux retours des siens. C'est leur souhait le plus ardent.
J'ai entendu un jour une mère dire : "Même si tu es arrivé avec les poches vides, le seul fait que tes bagages retournent dans ma chambre me suffit largement". C'est dire que chaque mère ne rêve que du retour de son enfant, et ce, quelle que soit sa situation financière. Ce qui ramène à penser que la situation des " Sans papiers " est plus qu'éprouvante car de tous les cotés le désir ardent des retrouvailles est pressant. Qu'Allah leur facilite les démarches ! Bref chaque voyageur rêve un jour de rentrer chez soi, chaque parent ne souhaite que le retour de son enfant. Dans le monde Soninké, ces retrouvailles sont les plus grands moments de bonheur. Retrouver son vieux père ou sa vieille mère après des années de séparation est très significatif et plein de chaleur.
En général, les pleurs de joie s'invitent pour montrer à tel point ces moments sont chargés d'émotion. Qu’ils soient des enfants, des petits enfants, des amis ou des voisins, les retrouvailles dans le monde soninké constitue toujours un heureux événement. Tout heureux événement Soninké se fête. Ainsi on parle de Basunde. Comme il est mentionné au début, le Basunde est un repas fait pour celui qui vient .
Il y a plusieurs façons de Basunde :
- Les cadeaux en boisson
- Les cafés du matin ( Suxubanpo ou Suxubanho chez les Maliens )
- les plats copieux du diner
Ces plats cités ci-dessous sont souvent offerts par les sœurs, les tantes ou les amis de la famille qui accueille. Ils sont tous d'une façon ou d'une autre du Basunde.
Mais le vrai sens du Basunde dans le monde Soninké consiste à immoler un mouton ou un bœuf selon l'importance de l'hôte. Que cela soit dans le Gajaaga, Hayre, Xaniaga , Diahounou, les animaux les plus prisés du Basunde sont le mouton et le bœuf.
En général, c'est le chef de famille ou la mère de l'hôte qui annonce cet événement en achetant un mouton ou un bœuf. Il informe les membres influents de la famille et la nouvelle poursuit son chemin. On informe les amis, les voisins et certains pique-assiettes aux bonnes oreilles calent aussi le "Rendez-vous" dans leur agenda. N'oublions pas aussi que ce mouton ou bœuf peut être réservé des années par l'offrant par le système du Batundo. Le Batundo est le nom que l'on donne à un mouton ou bœuf que l'on élève à la maison. Il est plus souvent bien nourri et choyé.
Dés que la date du Basunde se fixe, on identifie les personnes qui doivent faire les courses et celles qui doivent s'occuper d’immoler et dépêcher le mouton. La plupart du temps, ces sont les jeunes filles ou jeunes mariées de la maison qui s'occupent de la première tâche sous la haute surveillance des mamans. Les jeunes garçons de la maison quant à eux deviennent les bouchers d'un jour avec l'aide du Laada lenmu de la famille pour ne pas dire Kome ou Hore . Ainsi, se déclenchent « les avant – propos » des festivités. Le jour J, tout le monde se réveille tôt pour s'occuper de la tâche qui lui ait assignée. C'est un jour de fête. Aujourd'hui avec la modernité, la musique est souvent de la partie mais certains familles n'acceptent guère cette tournure. Pendant que les femmes préparent le repas, les garçons attendent avec impatience les premières grillades tout en discutant autour du thé. Les discussions tournent très souvent autour de l'émigration. Chacun pense dans fort intérieur de son jour J. Les jeunes filles invitées tiennent aussi leur QG à quelques mètres des garçons.
Elles mettent leurs beaux habits et de très belles parures pour marquer de leur empreinte cette journée. C'est le moment idéal pour taper dans l'œil de l'hôte s'il est célibataire ou d'un des amis. En plus, aujourd'hui, avec l'avènement des caméscopes, ces événements sont immortalisés alors c'est le moment privilégié pour faire bonne impression. Une fois que le repas est prêt, on mange, on se désaltère et on danse. Les bols de Yassa par - ci, les bols de viandes grillés par - là sans oublier le Sosse ( Tiakri ) et les boissons sucrées qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses du village. On mange, on se désaltère, on déguste et on danse. Le Basunde est presque pareille au jour de mariage. Cette ambiance dure jusqu'au soir. Ainsi on fête l'arrivée des fils dans les villages Soninkés.
Toutefois, il faut noter que cet événement fait surgir un certain nombre de questions dont les plus pertinentes sont les suivantes :
Pourquoi tant gâchis pour fêter juste un accueil ?
La tournure prise aujourd'hui par le Basunde ne ternit-elle pas l'image de Soninkaxu ?
Certains ne profitent t-ils pas de cet événement pour faire des jaloux ?
Ainsi on bute sur une autre facette du monde Soninké :
Pourquoi nos fêtes sont devenues source de gaspillage ?
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Samba KOITA dit MAKALOU