Habitués à se nourrir quotidiennement de viande, ils sont contents ce jour-là du retour des pêcheurs de la pêche qui leur offrent du poisson dont ils mangent goulûment. Une semaine après avoir été circoncis, les kutunto organisent une grande séance de lessive au fleuve. Ce rituel est fixé au vendredi ; ils vont pouvoir y laver tous leurs vêtements sales. Cet événement est appelé mawon waxinde. Notre informatrice compare cette journée au sama sigen koota (jour de la résurrection), pour qualifier son caractère solennel et émouvant. En y allant, les Kutunto sont encadrés par leurs guleye, et ils chantent :
Yeye, ye alijuma sigen koota O en ce jour de vendredi
Borege gedi renme natta La femme stérile a éprouvé le désir d'enfanter
Yeye, ye alijuma sigen koota O en ce jour de vendredi
Borege gedi renme natta La femme stérile a éprouvé le désir d'enfanter
Après cette journée chargée de souvenirs (durant laquelle toute femme éprouve le désir d'y voir participer son enfant), les circoncis sont rejoints dans la soirée chez le bawo par les filles. De la même manière que précédemment, elles les distraient en chantant. Parfois, ces rencontres peuvent se transformer en railleries entre les deux groupes. Les kutunto se moquent des filles en les traitant de mangeuses de jujubes. Voilà ce qu'ils disent :Yeye, ye xusu xore kiran noxu keme fa xotte wono ( là où les vierges passent l'après-midi, on y trouve des centaines de noyaux de jujubes). Et les filles de répliquer : Yeye, ye yunu xulle bugubege an ta kitta man gan xuru (Nul ne se vantera dans un pantalon bouffant sans qu'il n'ait souffert au préalable), allusion faite à la rudesse de l'initiation.
Une fois les plaies des kutunto cicatrisées, le bawo décide d'un commun accord avec eux de convenir d'un jour pour quitter définitivement les lieux de retraite (biru). Chaque circoncis pourra alors regagner sa famille. A ce propos, Saint-Père (1925 : 58) écrit : " Au bout de trois semaines, lorsque les kutunto sont guéris, le bao fixe secrètement avec eux, le jour de la fin de leur retraite… ". Ce jour-là, les kutunto sont livrés à eux-mêmes car la tradition veut que leur retour au village, soit marqué par des réjouissances au cours desquelles ils sont autorisés à tuer délibérément avec leurs armes (lances, bâtons…), tout animal domestique qui se mettra en travers de leur chemin. C'est ainsi qu'un ce jour, ils assomment tous les poulets en dehors des poulaillers, peuvent tuer également tout mouton ou bœuf mais à la seule condition de les abattre avec leurs lances (tanmu). Ils apportent leur butin hors du village et le dépècent. " De cette viande, ils font des parts : une pour le bao, une pour les goulèyes, et le reste pour eux-mêmes " décrit toujours Saint-Père, p. 59.