« Les Soninke aiment se vanter, se gargariser de certaines valeurs. Beaucoup de Soninke, en majorité parents aujourd’hui, restent fortement attachés à la noblesse séculaire de leur ascendance au point que toute déviance, mimine soit-elle, les choque. Pour ces gens-là, certaines pratiques de leur descendance salissent leur généalogie et déshonorent leur nom de famille. Ainsi, cigarettes, alcool, drogue ne doivent en aucun cas se conjuguer avec leur patronyme. Pour les Soninke, fumer, boire l’alcool, consommer de la drogue est la chasse gardée des damnées pour ne pas dire des « gens perdus ». Ainsi, quand une personne fume, boit de l’alcool, fume du « shit», les Soninke disent très souvent : « Perdin Nté » ( un égaré). Donc, on comprend aisément que ces pratiques sont très mal perçues dans la société Soninke. De ce fait, quand une fille Soninke tombe dans le piège du tabagisme, de l’alcoolisme, du ganja ( drogue ), la terre se dérode sous les pieds de sa famille. Les parents sont meurtris. La fratrie est écœurée. Les proches sont abasourdis.
Comme le dit le proverbe Soninke : « On s’attend toujours à voir l’os dans la gueule du chien. Quand on le trouve dans la bouche du mouton, c’est la honte ». Une manière de dire que trouver une cigarette entre les jolies lèvres d’une fille Soninke est synonyme d’effondrement des valeurs dans le monde Soninke. C’est limite un sacrilège. On jette le déshonneur sur toute sa famille. On salit les parents. On critique. On calomnie. Dès fois, quand cette fille est issue d’une certaine hiérarchie sociale, les esprits disjonctent pour ne pas dire « pètent un câble ».
Aujourd’hui, ces pratiques sont devenues banales. Les filles Soninke dament le pion aux hommes sur le terrain du tabagisme. Beaucoup de filles s’adonnent de plus en plus à l’alcool et à la drogue. Ce n’est plus un secret. Toutes les familles sont concernées. On a tendance à incriminer les filles nées en France dès qu’on évoque ce sujet. Force est de constater que, dans nos pays d’origine ( Mali, Mauritanie, Sénégal, Gambie…), nos sœurs sont devenues également de véritables consommatrices de « clopes ». Elles sont nombreuses à toucher également à l’alcool et au cannabis. En bande ou en nombre restreint, elles se donnent à cœur joie à tous ces plaisirs nocifs. C’est tout le monde soninké qui est touché par ce phénomène à l’instar des autres communautés conservatrices du monde. Croiser une jeune fille Soninke grillant sa clope est devenu banal de nos jours. Voir une jeune fille siroter un verre de champagne lors de certains évènements festifs n’est plus scandaleux. La drogue est également une substance consommée par les filles maintenant.
Nul besoin de revenir sur les raisons qui poussent ces filles à s’adonner à la cigarette et autres produits du genre . Comment sont-elles tombées dans ces écueils ? Qui les ont entrainées dans cette voie scabreuse ? Autant de questions qui intéresseront certainement nos lecteurs. Mais, nous évitons de jouer aux psychologues. Notre but est tout autre. Il ne s’agit point de se laisser aller à des jugements subjectifs. Notre objectif n’est pas également de guillotiner moralement ces filles. L’idée est de trouver des voies et issues pour extirper nos sœurs de ces jouissances éphémères. Il s’agit également de démystifier la question du tabagisme et de l’alcoolisme pour établir une communication entre parents et filles, frères et sœurs, maris et femmes. Avant tout, nous sommes tous des humains. Nous subissons de plein fouet une culture occidentale qui nous agresse quotidiennement. Comme le dit l’adage : « Nul ne peut participer à un jeu des singes et refuser que la queue d’un signe le touche ».
Dans un premier temps, il faut tordre le cou aux préjugés. Une fille qui fume ne veut pas dire « fille frivole » ou « fille sans intérêt ». Une fille qui fume ou « tise » n’est pas une « fille perdue ». Loin de là. Il faut préciser ici que la cigarette fût pendant plusieurs décennies le dada des femmes intellectuelles. Donc, ce fût une affaire de « raffinement » avant d’être reléguée à une affaire de présumées « crados ». Ces filles sont nos sœurs, nos tantes, nos enfants… Elles sont également les futures mères du monde Soninke. Donc, il convient de leur tendre la main, de les amener au dialogue afin qu’elles délaissent ces pratiques jugées « honteuses » dans notre culture. Ce Dimanche 13 Mars 2016, l’émission radio « Leminaxu bera » de Soninkara.com traité ce sujet avec les Soninke du monde entier. Une émission de jeunes qui passe tous les Dimanche à 21 Heures ( Heure française ) sur le Web.
Au sortir de cette émission, il est préconisé de changer de regard sur les fumeuses. Malgré le choc, il faut dépassionner le débat. Il faut éviter de les stigmatiser et de les ranger dans une mauvaise corbeille. Ces filles sont elles-mêmes les premières victimes de ces pratiques nocives. Beaucoup d’entre elles souffrent de leur condition de « fumeuses ». Elles encaissent péniblement les mauvais regards et le mépris de leur entourage. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle beaucoup se cachent et limitent les fréquentations familiales pour ne pas salir la réputation d’une mère, d’un père, d’un mari voire d’un frère.
La communication est la base de la solution. Face à une sœur ou une proche qui fume, il faut prôner le dialogue au lieu de l’accabler sévèrement. Vous la mettrez mal à l’aise. Vous risquez de bafouer son honneur et sa dignité. Le résultat sera très souvent négatif. Vous ouvrez le boulevard de la rébellion.. A défaut de vous ignorer royalement, elle risque de vous sortir des phrases assassines qui résonneront dans votre tête pendant une décennie. Son amour-propre l’oblige à répondre pour se réhabiliter moralement dans sa tête. Nos auditeurs prônent donc un dialogue franc et responsable. Les mots doivent être bien choisis et bien placés pour l’atteindre dans son amour propre avec douceur. On pourra évoquer les méfaits de ces produits sur la santé même si elles les savent toutes. On peut également secouer la fille par les mots pour qu’elle prenne conscience de la portée de son geste. En fumant, une fille remet en question l’éducation de ses parents. Si elle tient à sa notoriété familiale, son amour propre sera atteinte. Aussi, ces pratiques ne sont-elles pas honnies dans notre religion qui est l’islam ? On peut également provoquer un électrochoc en bifurquant sur la bretelle religieuse. A défaut d’abandonner complètement la clope ou l’alcool, son esprit le tortura à chaque occasion qu’elle grillera une cigarette ou sirotera une boisson alcoolisée. Donc, vous l’avez compris, nos auditeurs prônent le dialogue en faisant appel à des considérations sanitaires, culturelles , religieuses etc.
L’autre solution préconisée est de rendre « mariable » ces filles et de ne pas échoir leurs projets de mariage. En effet, il est inconcevable qu’un père ou une mère de famille accepte de marier son fils à une « fumeuse » ou une « tiseuse ». D’ailleurs, beaucoup de garçons savent déjà que la relation avec une telle fille est vouée à l’échec car les parents préfèrent mettre une croix sur leur fils que de bénir l’ union. Malheureusement, dans notre communauté, les familles se connaissent. Il suffit de dire le prénom d’une fille pour que l’on étale son pedigree. Qui n’a pas entendu que sa sœur ou sa cousine fume par des bouches indiscrètes sans aucun lien de parenté ou d’amitié avec la concernée ? Les radios « Kankan » distillent tout. Pour des raisons de vengeance ou de méchanceté, ces bouches n’hésiteront pas à vilipender une telle ou telle fille sans gêne. Ainsi, les réputations de « fumeuses » font échouer plusieurs projets de mariage. Une bonne excuse pour des garçons, qui après avoir donné espoir, s’agrippent à cette tare pour mettre fin à la relation.
Face à cela, nos auditeurs appellent les hommes à plus de responsabilité. D’abord, il faut faire la part des choses. Ce n’est pas parce qu’une fille fume qu’elle sera forcément mauvaise épouse ou mauvaise mère. Il faut ainsi éviter les amalgames. Les hommes doivent aider les femmes à soigner leurs comportements. C’est aussi un des objectifs du mariage. Au-delà de partager des moments agréables, le mariage doit permettre également d’apprendre des uns et des autres pour l’amélioration des comportements. Le mari doit s’investir au quotidien pour conscientiser sa femme, la réhabiliter socialement et culturellement. L’amour est un médicament qui peut guérir tous les maux. Quand on aime une personne, on est prêt au sacrifice pour cette dernière. Ainsi, un homme qui brave vents et marées pour s’unir avec une fille de mauvaise réputation à cause de la cigarette, de l’alcool ou du ganja peut bel et bien créer un électrochoc dans l’esprit de cette fille. Cette dernière sera touchée dans son amour propre et fera l’impossible pour être à la hauteur des espérances et de la confiance accordée. Ainsi, elle se départira de toutes les mauvaises pratiques qui souillaient son nom. Donc, les hommes Soninke doivent murir et éviter les raccourcis. Ils doivent accepter ces femmes qui n’ont rien de moins que les autres femmes. Certes, elles ont un vice difficilement acceptable dans notre communauté. Mais, pour autant, sont-elles moins sérieuses que les autres filles ? D’autres filles que l’on arrache sur la bourse du mariage cachent des vices plus malsains que la cigarette. En somme, fumeuse ou tiseuse ne veut nullement dire « salope » comme des esprits peu ouverts peuvent le penser. De la même façon, un homme qui fume ou boit ne veut pas dire délinquant. Il faut éviter les amalgames. Il faut appeler les uns et les autres à l’entraide. Au lieu de pointer du doigt les mauvaises pratiques des uns et des autres, on gagnera plus à leur apporter une aide par le dialogue, l’orientation vers un professionnel …C’est cela le sens de la fratrie, de la parenté et de l’amitié. Surtout, il ne faut pas oublier que ce phénomène concerne toutes les familles Soninke. Aujourd’hui, vous pouvez ne pas être touché par ce fléau mais rien ne dit que demain votre fille ne serait pas adepte. Clin d’œil au conte des deux margouillats, du chien, du taureau, du cheval, du bouc pour comprendre notre pensée.
In fine, les parents doivent faire de la prévention. On ne nait pas « fumeuse » « tiseuse », « droguée », on le devient. On adopte ces vices pendant l’adolescence en général. Donc, il faut surveiller les fréquentations des jeunes filles et veiller à ce qu’elles comprennent la nocivité de ces pratiques. Mieux vaut prévenir que guérir, dit-on. Aussi, les jeunes filles et les jeunes mamans Soninke « ex-fumeuses » ne doivent-elles pas s’investir pour sensibiliser les petites sœurs des dangers du tabagisme, de l’alcoolisme voire de la drogue. » Si elles ne veulent pas le faire à visage découvert, les réseaux sociaux proposent une palette de moyens ( Page, chroniques…). Tout cela dans un total anonymat.
Samba Fodé KOITA dit Makalou, www.soninkara.com