L'enseignement au Collège
Ah le collège ! Ce grand mirage. Autrefois les jeunes bakélois n'avaient pas le choix. La ville n'avait pas de collège et les candidats heureux de l'entrée en sixième devaient systèmatiquement faire leur collège à Tambacounda ou à Dakar. Cette rupture n'était pas si facile pour les nouveaux collégiens. Ils quittent parents et amis pour aller déposer leurs bagages dans une ville ou chez une famille qu'ils ne connaissent pas. Beaucoup survivront à cette aventure alors que certains délaisseront le collège faute de bonne famille d'accueil et de moyens financiers. Les familles d'accueil ne sont pas toujours tendres avec les nouveaux collégiens. Bon nombre d'entre eux doivent travailler dur pour mériter l'hospitalité de leur famille d'accueil. Le collège Mame Cheikh Mbaye de Tamba a marqué nos ainés. Certains n'avaient pour repas que les maigres cacahuètes ou pains envoyés par leurs parents. Leurs familles d'accueil n'avaient pas de moyens pour les prendre en charge. Ils mangeront une fois par jour et iront chercher un fagot de bois à la brousse en guise de participation. Cette sitatuion a duré jusqu'aux années 1980.
En 1982, Bakel se dota de son propre collège appelé le Lycée Waoundé N'diaye de Bakel. Ce collège se trouvait dans le quartier HLM. Il a été créé au bon moment. Bon nombre de collégiens inscrits à Tamba n'en pouvaient plus de leurs conditions de vie. Les jeunes étaient soulagés. Tous les collégiens des villages environnants venaient s'inscrire dans le collège de Bakel. Tous les matins, de jeunes gens prennent d'assaut le quartier HLM avec quelques cahiers à la main. Le changement entre l'école primaire et l'école secondaire se trouvait à ce niveau. Au primaire les elèves ramenaient tous leurs cahiers et livres et restaient de 8 heures du matin à 18 heures avec quelques heures de récréation et de "pause - dejeuner" tandis qu'au collège, ils ne ramènaient que les cahiers des matières à étudier. Les collégiens bénéficient également d'horaires aménagées et font face à une nouvelle autorité. Le bâton ou la cravache du maître qui terrifiait à l’école primaire est devenu caduque. Les nouveaux collégiens sont généralement polis. Ils craignent l’autorité et le nouveau mode de fonctionnement. Chaque retard ou absence doit être justifié et signalé aux parents par les surveillants. Un billet de retard donne droit d’assister aux cours et le billet d’entrée redonne le droit de reprendre les cours après une quelconque absence.
Au collège, les élèves héritent d’une responsabilité. Ils votent et élisent leurs délégués de classe. Le délégué de classe est le representant des élèves auprès des surveillants et des professeurs. Il défend ses camarades en cas de problèmes et jouent le rôle d’intermédiaire entre la surveillance du collège, les professeurs et les elèves. En plus de ces missions, il doit aussi ramener les cachiers de texte et d’absence ainsi que les outils de travail aux professeurs. Il doit aussi effacer le tableau au début et à la fin des cours. Les deux premières années se passent normalement. Les collégiens changent souvent d'attitude en classe de quatrième ( 4 ème ).
A la troisième année de collège qui coincide normalement avec l’âge de la puberté pour plusieurs élèves, les collégiens deviennent incontrolables.
Dés le début de l’année, on leur offre le choix entre une langue étrangère ( Espagnol, Arabe ) et la physique chimie. Dans ces cours, les deux ou trois classes de même niveau se regroupent par matière. Les èlèves qui ont choisis l’arabe et l’espagnol font cours à part et les apprentis physiciens et chimistes en font autant. Ils commencent à aménager leurs horaires de classe. Pendant que les plus serieux apprennent d’autres préfèrent aller prendre le thé chez un camarade ou fumer une cigarette. C’est au cours de cette année que certains élèves grilleront leur premier tabac. Ils se regroupent par affinité ou par niveau d’intelligence. Les doués entretiennent généralement des relations amicales et font leurs devoirs ensemble tandis que les plus nuls se créent d’autres passions : la cigarette, le thé, la drague ou le foot. La classe de quatrième est une année charnière. Elle permet de cerner les bons et les mauvais élèves. En plus de toutes ses diffilultés, les élèves doivent faire face à un changement radical de leur porgramme de sciences naturelles. Avant, ils étudiaient les plantes et les oiseaux. Désormais, ils doivent s’initier à la biologie. Le cours de biologie affectionnait tout le monde. On parle d’anatomie, de séxualité, de grossesse, de puberté, de virginité… Tout le monde prête une oreille attentive au professeur.
Je me rappele un jour, en plein cours de biologie j’avais la tête ailleurs. Soudain, dans la classe j’entendit ce mot : virginité. Ne sachant pas ce que cela voulait dire, j’interpellai mon professeur ( Abdou DIOM ) en lui demandant le sens de ce nom.
Quelle honte ! Tout le monde me regardait avec de gros yeux. Ils venaient de deviner que j’étais pisso. Les filles commencèrent à me chambrer et mes copains à se moquer. Dans ma tête, tout était clair. Je savais que je n’étais pas seul dans cette situtation. Plusieurs de mes camarades chambreurs étaient dans la même posture. Ils voulaient juste impressionner les filles de la classe.
Après les cours, les jeunes avides de liberté investissaient les plages sablonneuses du quartier HLM de Bakel. Ils allaient souvent avec les filles de leur classe. Tous les élèves à ce stade veulent avoir leur liberté. Ils soignent partculièrement leur look et profitent de chaque occasion pour impressionner les filles. Des coiffures "Zoulou" aux pantalons "jungle", les jeunes font tous pour attirer l'attention. Les jeunes filles quant à elles choisissent des tenues courtes et provocatrices. Elles mettent en valeur leurs poitrines et leurs hanches. Tout regard devient significatif. C'est le temps des premiers amours et des premiers flirts. Pire, certains connaîtront leurs premières expériences sexuelles. Les jeunes collégiens sortent tous les week - end en soirée dansante. Dés fois, ils rencontrent leurs professeurs et leur ravissent la vedette. Ce nouveau désir de sensations fortes pousseront certains élèves à se droguer et à la débauche sexuelle. À ces diffultés s'ajoutent très souvent les grossesses précoces. Plusieurs filles délaisseront les études parce que leurs premières éxpériences sexuelles leurs seront fatales. Les jeunes ne maîtrisent pas trop souvent les fameuses méthodes de contraception et commetront des erreurs irréparables qui leurs éloigneront du circuit scolaire. Beaucoup de filles tomberont enceintes et connaitront une jeunesse mouvementée. Les garçons quant à eux seront en déperdition scolaire parce que père de famille à 17 ans. Ils défient l’autorité scolaire et parentale. Ils vont et reviennent des cours à leur guise. Certains battront des records d’absenteïsme. Ils seront traduits en conseil de discipline puis exclus du collège. Beaucoup d'élèves délaissent le circuit scolaire en classe de quatrième ( 4 ème ). Les élèves qui passeont en classe de troisième auront la chance de se présenter à l'examen du BFEM ( Brevet de Fin d'Etudes Moyen ).
A Bakel, bon nombre de professeurs ont marqué de leur empreinte l'histoire du Lycée Waoundé N'diaye. Malgré la l'hostilité du climat et la lointeneté de Bakel, ils ont laissé leurs familles pour venir exercer ce noble métier qui est l'enseignement. Certains ont gravé leurs noms dans la mémoire collective des bakélois. Ils étaient infatigables et mettaient coeur et âme pour sortir la jeunesse bakéloise de l'ornière. Ils disposaient de moyens limités et se trouvaient à des centaines de kilomètres de leurs familles. Ils etaient généralement Sérères, Diolas, Mankagnes, Manjaques, Pepels, Peuls et Wolofs. Grâce à eux, Bakel obtenait toujours de bons résultats. Bakel a toujours eu de bon resultats dans les differents examens. Ils prendront sous leurs ailes les braves élèves de troisième durant toute une année. Ils les aideront à bien se préparer à leurs examens. Elèves et professeurs ont un seul objectif : battre le record national à l'examen du BFEM. Dés le début du mois d'octobre, les professeurs commencent le programme. Ils motiveront leurs élèves et les mettront dans les conditions optimales de réussite.
La classe de troisième est particulièrement difficile. Les élèves devront maîtriser plusieurs matières afin de pouvoir réussir leurs examens de fin d'années. Ils auront une centaine de léçons à mémoriser en histoire et géopgraphie et de multiples formules mathématiques à retenir. Ils forment des groupes de travail pour réviser et pour s'entraider dans les differents matières. Les professeurs quant à eux feront des séances de rattrapages pour finir le programme mais aussi pour mieux faire comprendre leurs cours aux élèves. Normalement l'année scolaire se termine au mois de Juin au Sénégal mais les élèves de troisième n'auront le répis qu'au mois de Juillet. Les éxamens de BFEM tombent souvent à la dernière semaine du mois de Juillet. Les élèves composeront pendant trois jours. Les épreuves de l'examen de BFEM sont souvent difficiles. Le centre d'examen de Bakel etait tenu par des professeurs de Tambacounda. Ils surveilleront et corrigeront les épreuves des élèves. Les résultats tombent toujours au quatrième jour de l'examen. La délibération des examens était fatidique et insupportable. Les élèves, soucieux de leur avenir auront une pression énorme sur leurs épaules. Le président du jury convoquait les élèves l'après midi. Ces derniers venaient toujours en avance. Ils attendront des heures dans les locaux du CEM ( Centre d'Enseignement Moyen ) en attendant d'avoir leurs résultats. Vers dix huit heures, le président du jury se mettait dans le hall du CEM et demandait aux élèves de s'approcher. Visages avides, peur au ventre, les jeunes garçons accourraient vers lui et un long silence envahit la foule. Tout à coup, il se mettait à lire la fameuse phrase : " Les élèves dont les noms suivent sont déclarés admis à l'issue des épreuves de l'examen du brevet de fin d'études moyen". Après cette phrase assassine, il se met à donner les noms des heureux admis. Ces derniers seront soulagés et crieront victoires tandis que les ajournés se mettront à pleurer et à crier malheur. Quant aux élèves qui seront admis au deuxième tour, ils se présenteront le lendemain au collège pour subir les examens oraux qui leur permettront de décrocher leurs diplômes de BFEM. C'est la fin du cursus moyen pour les brevetés. Ils passeront de bonnes vacances et se prépareront à affronter une autre étape de leur vie : Le Lycée.