Le premier à être circoncis est le chef (xirse) mais cette appellation est remplacée par le terme (jerna). Cependant les bullu [5] sont déjà préparés pour accueillir les nouveaux circoncis (kutunto) qui vont y recevoir les premiers soins et le pansement administré est à base de poudres de gousses de gonatier préalablement préparé par les guleye. Une fois le murunte opéré, son kallingora [6] le transporte sur sa monture jusqu'aux bullu. Dès que le forgeron ampute le prépuce du murunte une voix s'élève : " est coupé " (a kutti). Cette annonce est suivie instantanément par des salves de fusil alors que les femmes tenues à distance de la cérémonie entonnent ce chant :
Oku disan Xura Notre écharpe est devenue propre
Disa xulle Echarpe propre elle est
Oku disan xura Notre écharpe est devenue propre
Disa xulle Echarpe propre elle est
Le refrain " propre " qui revient de façon récurrente dans le chant, me laisse réfléchir sur l'idée qu'on prête à cette pratique. En effet, le murunte est souvent perçu comme quelqu'un de malpropre. Le rituel ainsi accompli lui confère socialement un nouveau statut par lequel il a droit à plus de déférence. Comme il est décrit antérieurement, les cavaliers font un ballet incessant de va et vient pour récupérer au fur et à mesure jusqu'au dernier les murunto circoncis afin de les ramener aux bullu. Une fois tous les circoncis (kutunto) réunis, les femmes chantent à nouveau :
Xaxe na wuru wo sanba Le peureux prend la fuite ô samba
Oku sanba nta wurura bada Nous, notre samba ne prendra jamais la fuite
Sanba xaxe Samba, le peureux
Xaxe na wuru wo sanba Le peureux prend la suite ô samba
Oku sanba nta wura bada Nous, notre samba ne prendra jamais la fuite
Sanba xaxe Samba, le peureux
Ce chant est un hommage élogieux au courage des circoncis pour ne pas s'être dérobés à l'épreuve d'endurance que cette pratique renvoie. Les guleye qui s'affairent désormais autour des kununto, demandent qu'on leur remette les vêtements des circoncis désignés par le terme jangido : ils sont constitués de deux pièces à savoir une chemise très large et un chapeau. Précisons que les jangido peuvent être de couleurs différentes d'un enfant à l'autre. Cette différence de couleur, tient au fait que chaque famille se distingue par sa coutume (laada). Outre leurs habits cérémoniels, les kutunto doivent compléter leur tenue par des objets [7] comme : la lance (tanme), les petites baguettes (sollilenmu), un couteau (lebo)… Ainsi revêtus, ils se dirigent vers les hangars de retraite (kutunta biru) installés près du figuier (turo). Au moment de s'y rendre, ils désignent une jeune fille (sawane) pour s'occuper des tâches ménagères. En tête du cortège, se met le jerna servant de mentor aux autres pour les conduire aux hangars. Arrivés sur les lieux, qui leur serviront de refuge pour un temps, les circoncis doivent y accomplir des salutations d'usage en faisant trois tours d'honneur avant de s'asseoir. Au même moment à cet endroit, est apporté un petit déjeuner copieux (fondo). Près d'eux, on installe une grande cruche (lalle) pour y verser leur eau. Cette corvée d'eau est à la charge des jeunes filles. En effet, elles doivent aller la chercher au fleuve pour la transvaser dans la cruche. Malgré tous les services rendus aux circoncis, elles ne sont jamais remerciées à juste titre. A tout moment un membre du groupe peut se plaindre d'elles pour les embêter : on l'appelle le boudeur (xereene).