LE FEDDE, LA CIRCONCISION, ET LE PORT DU PANTALON À BAKEL

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LE "FEDDE", LA CIRCONCISION, ET LE PORT DU PANTALON À BAKEL


Auteur : Yaya Sy ( Anthropologue, Professeur d'Histoire )

Nous avons vu que les N'Diaye qui ont fondé et développé Bakel tel que nous le connaissons actuellement sont des migrants oulofs venus au XVIè S. (A. Bathily, 1989) qui se sont soninkisé avec le temps en s'alliant avec les Bathily, en particulier sur les plans matrimonial et militaire. Les N'Diaye ont ainsi adopté progressivement les traditions soninkées (classes d'âge, excision, circoncision, port du pantalon, mariage, mort, etc...) et ont joué un rôle majeur dans la vie politique, économique et sociale du Gajaga.

Bakel, bien avant la construction du fort français en 1818, était à la fois un gros village soninké et une petite ville cosmopolite qui marie avec bonheur la pratique des traditions soninkées et les changement impulsés par l'acculturation, puis par la modernité avec la colonisation qui a instauré le commerce fluvial avec la France depuis le XVIIè s..

On comprend pourquoi les liens avec les villages environnants sont spécifiques : les villageois sont à la fois moqueurs, voire sceptiques quant à notre identité soninkée, mais un peu jaloux aussi du leadership de la ville où se sont installés les colons, et qui a bénéficié des vagues successives de réfugiés de toutes les guerres du XVIIè à la fin du XIXè siècle. Un Havre de paix au confluent des turbulences entre l'Afrique du Nord et l'Afrique Noire, entre l'Europe et l'intérieur du Continent par Saint-Louis et le Fleuve Sénégal. Son histoire n'a réellement émergé qu'avec l'arrivée des N'Diaye venus du Jolof avec leurs armées et leurs courtisans ; même s'il est communément admis que c'est la famille Wane qui s'est installée la première dans une grotte non loin du fleuve avant l'arrivée des N'Diaye et qui pratiquait la pêche selon A. Bathily (1989).

Nous devons, Bakélois et villageois, assumer ce passé et nous tourner tous résolument et sans complexes vers l'avenir afin de dynamiser la culture soninkée dans laquelle nous baignons et qui, ironie de l'histoire, se ouolofise actuellement... à Bakel et sur l'ensemble du territoire sénégalais. Alors que jusqu'à la fin des années soixante les différentes communautés composant la ville de Bakel (Soninkés, Ouolofs, Peuls, Bambaras, Bozo, Maures, Khassonkés, Joolas, etc.) tout en préservant le noyau dur de leur identité d'origine, ont su s'imprégner des traditions soninkées et perpétuer "l'identité villageoise" de Bakel. Il n'était pas rare qu'à Bakel on assistât à peu de jours de décalage à une fête soninkée, peule, bambara ou Khassonké.

Les enfants nés à Bakel participaient tous dès l'âge de sept à huit ans à la constitution du fedde (classe d'âge) dont le nom était attribué par le chef de village. Les fedde avaient des noms comme l'Amérique (année où les Américains sont venus à Dakar en 1945), Charvet (commandant de cercle), De Gaulle..., etc.

Une fois rassemblés au sein du nouveau fedde garçons et filles du même âge reproduisent le schéma organisationnel du village avec les différents groupes sociaux : en tête desquels les descendants des régnants que sont les jeunes N'Diaye, qui seront les futurs chefs de village, nous avons ensuite les marabouts en herbe, et le gros de la troupe est composé des petits descendants d'esclaves, quant au niaxamalani, ils sont dès le début, chargés des convocations pour tous les rassemblements du fedde (gancinde).

En principe les jeunes organisent une danse nommée jamba les nuit du jeudi au vendredi à laquelle "leurs filles" (du groupe d'âge) sont tenues obligatoirement de venir battre des mains pour animer la manifestation et encourager les jeunes gens. La fille la plus âgée des N'Diaye se met debout en ligne face au jeunes danseurs, à coté d'elle la fille la plus âgée des marabouts, puis la plus âgée des esclaves et des niaxamalani, les autres filles se rangent après. En cas de refus de la part d'une fille ou d'un groupe de filles de venir à cette fête organisée à la grande place du village, les garçons peuvent aller les chercher dans leur quartier et si nécessaire les battre avec des branches de palmier... pour les rabattre vers la place du village, et comme les filles à cet âge sont souvent plus fortes et plus rusées que les garçons, l'expédition peut se terminer en déroute pour les petits machos... qui demanderont en dernier ressort des renforts d'autres groupes de garçons pour ne pas perdre la face.

Pour se faire de l'argent en vue de préparer la grande fête de "retrait de la place du village" les feddalemmu (garçons du fedde) vont cultiver, parfois à l'improviste, les champs des notables du village qui leur donnent des moutons, des béliers, un boeuf, ou de l'argent qu'ils thésauriseront pour préparer ce grand jour.

Quand ils auront atteint pour la majorité d'entre eux, l'âge de la circoncision (quinze à dix-huit ans) leurs parents se concertent avant la saison des pluies et décident de fixer la période de circoncision. La cérémonie a lieu en principe pendant la saison sèche à la fin des travaux du falo (terres inondées) vers les mois de janvier ou février.

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Commentaires (2)

  • Sacko2

    jtouve ke c 1 mank de respect pou r lé filles

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