Mauritanie: Qui ira au secours du prochain bateau d'émigrés en détresse

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ImageNouadhibou

L'affaire des 400 migrants clandestins, des Asiatiques pour la plupart, dont l'embarcation a dérivé pendant plusieurs semaines au large des côtes mauritaniennes, a eu de telles conséquences diplomatiques qu'il est peu probable que les gouvernements acceptent d'offrir leur assistance si une situation identique se reproduisait.

Pour les Nations Unies, cela laisse penser qu'en cas de crise humanitaire, personne ne voudra intervenir.

« La question fondamentale qui se pose et qui n'a pas été résolue est : que se passera-t-il si un bateau de migrants clandestins en détresse se trouve près des eaux territoriales mauritaniennes et a besoin d'assistance ? », a confié à IRIN Cécile Molinier, la plus haute responsable des Nations Unies en Mauritanie.

Le nombre de migrants clandestins ayant quitté les côtes d'Afrique de l'Ouest pour les Iles Canaries, en Espagne, a considérablement augmenté au cours des dernières années et en 2006, ils étaient près de 30 000.

La plupart de ces migrants clandestins sont des Africains qui tentent la traversée de l'océan Atlantique en pirogues, mais de plus en plus de ressortissants de pays asiatiques se rendent en Afrique de l'Ouest par avion, avant de rejoindre l'Europe en bateau.

Le Marine One, un crevettier tout rouillé, avait quitté le port de la Guinée Conakry en décembre, mais était tombé en panne en cours de la traversée.

En janvier, un navire de sauvetage espagnol a repéré le Marine One, mais ce dernier est resté pendant des semaines au large des côtes mauritaniennes, car ni l'Espagne ni la Mauritanie ne voulaient porter la responsabilité d'accueillir les occupants sur son sol.

Le 12 février, la Mauritanie a autorisé l'Espagne à remorquer le navire jusqu'au port de Nouadhibou, à condition que les autorités espagnoles acceptent ensuite de rapatrier par avion les passagers du bateau, quatre heures après leur débarquement.

La plupart de ces passagers ne possédaient pas de pièces d'identité et avaient refusé d'indiquer leur pays d'origine afin que l'Espagne ne puisse les débarquer dans aucun autre pays.

Depuis le mois de février, ces migrants sont hébergés dans un entrepôt du port de Nouadhibou, pendant que les autorités de plusieurs pays tentent de statuer sur leur sort.

Des responsables pakistanais étaient attendus en Mauritanie, tandis que des représentants de l'ambassade de l'Inde au Sénégal ont déjà rendu visite aux clandestins.

Il y a quelques jours, près de 200 d'entre eux ont reconnu être de nationalité indienne, et près d'un tiers a déjà quitté la Mauritanie à bord de vols commerciaux.

Des regrets de part et d'autre

La crise semble déjà appartenir au passé. L'Espagne et la Mauritanie disent regretter de s'être embarquées dans cette affaire et précisent qu'elles n'interviendront plus à l'avenir.

« Je pense que nos autorités maritimes ont commis une erreur en allant à leur secours », a indiqué un diplomate espagnol, qui a souhaité garder l'anonymat. « La prochaine fois, nous veillerons à ce que l'Espagne ne se mêle pas de ce genre d'affaire ».

Les conventions internationales de l'Organisation maritime internationale obligent les pays riverains à offrir aux naufragés « un endroit sûr et [à] satisfaire leurs besoins humains élémentaires (nourriture, abri et soins médicaux) ».

La Mauritanie, un des pays les plus pauvres au monde, n'a pas ratifié tous les traités et explique qu'elle est déjà assez débordée par les milliers de migrants clandestins ouest-africains qui transitent par son territoire pour se rendre en Europe.

« Nous ne sommes pas concernés par ces migrants [asiatiques] et c'est la dernière fois que nous les accueillons », a dit un haut responsable mauritanien. « La prochaine fois, nous nous contenterons de prévenir le propriétaire du bateau et le gouvernement du pays dont le bateau bat pavillon, afin qu'ils viennent réparer le navire en haute mer », a-t-il ajouté.

Cette solution n'aurait pas pu être appliquée dans le cas du Marine One, car ce navire ne battait aucun pavillon et le propriétaire n'a toujours pas été identifié. Les responsables ne savent toujours pas si l'équipage a sauté par-dessus bord ou s'est mêlé aux migrants.

Source : AllAfrica