L’immigration clandestine : quelles réalités et quelles perspectives ?

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Témoignages sur les immigrés, les expulsés, les zones de refoulement. Inactions et complicité des Etats africains. Quels sont les recours juridiques, les réflexions et actions à mener ?

Le samedi 7 juillet 2007, L’AME (Association des Maliens Expulsés) a animé à la Maison des Jeunes de Bamako une journée de réflexion sur "l’immigration clandestine : quelles réalités et quelles perspectives" ? Après les discours de bienvenue et introductifs de Nouhou Keita (réseau Kayira du collectif de soutien) et Ousmane Diarra (président de l’AME), les participants au nombre d’une soixantaine, notamment des journalistes, des membres d’associations et d’ONG, des expulsés et des refoulés, des sympathisants de l’association, ont écouté et discuté les communications suivantes.

I.Témoignages :

I-1 « immigration clandestine, quelles alternatives face aux drames vécus dans le désert et sur la mer »

Intervention de Mr Alassane Dicko de l’Association des Maliens Expulsés (AME)

Désespoir à Tinzawaten

La journée a d’abord enregistré le témoignage vivant d’Alassane Dicko sur la réalité du camp des refoulés de Tinzawaten (carrefour malien à 5 km de la frontière algérienne). Il revenait d’une tournée dans le cadre d’une délégation de l’AME à Gao et Tinzawaten, conduite par Ousmane Diarra, président de l’AME. Là, 800 à 1000 candidats à l’émigration subissent sous un soleil de plomb de 40°, sans abri, les pires privations et humiliations. Tout manque dans cet enfer de sable et de cailloux. Demander de l’eau à son prochain signifie ici "vouloir le tuer". Une fois refoulé le migrant n’a qu’une idée c’est de recommencer et repartir. Progressivement s’installe la conviction qu’après tout ce que l’on a investi et enduré pour arriver là, il n’est pas question de retourner bredouille, c’est l"L’Europe ou la mort" ! Le "rêve européen" se transforme en "cauchemar" dans un "cercle vicieux" pratiquement sans retour . Selon Dicko : un "non choix". Les candidats migrants préfèrent la souffrance à la honte de revenir sans être aller jusqu’au bout. La souffrance ne change rien à leur détermination.

Il ressort de cette tournée que le Maroc exerçant pour le compte de l’Union européenne le rôle de sous-traitant de la lutte contre le droit à l’immigration déverse tous les 15 jours ses refoulés dans le désert de l’Algérie. Celle-ci convoie à son tour sa « cargaison » pour Tinzawaten. C’est un cycle infernal alimenté par le dispositif sécuritaire Frontex de l’Union Européenne de plus en plus efficace et la sous traitance effective de l’Algérie et du Maroc, par des accords officiels ou tacites avec les pays européens.

Les passeurs et coxeurs, eux vendent chaque jour l’illusion de nouvelles routes et destination, c’est un vrai système de criminalité. L’Union Européenne et les Etats Africains indexent singulièrement ces derniers, mais cela n’enlève rien au fait qu’ils sont les principaux piliers du système inhumain qui a cours dans le désert et en mer.

Dicko retient dans Tinzawaten 3 catégories de candidats migrants.

  •  Ceux qui veulent retourner, mais n’ont pas les moyens. L’AME peut les aider avec la collaboration de l’église catholique de Gao.
  •  Ceux qui ne veulent pas qu’on leur parle de retour, car ils ne peuvent retourner les mains vides. Par cette mentalité, observe Dicko "nous-mêmes culturellement nous fabriquons des candidats".
  •  Les intermédiaires présents depuis longtemps qui cherchent comment partir demain.

L’interrogation fondamentale de Dicko est : quelles modalités africaines dégager face à ce système de restrictions violentes de la liberté de circulation et ces réadmissions ? En conclusion, il insiste sur le fait qu’il ne faut pas oublier les candidats migrants et sur le fait que c’est le système mis en place qui produit cette situation désastreuse.

I-2 « Droit des migrants, cas des refoulés africains laissés aux frontières sud externalisées de l’Europe »

Intervention de Mr Cheick Hamalla Mangara, juriste de la LJDH, membre du collectif de soutien

Quels recours juridiques pour les refoulés ?

Parlant "des droits des migrants refoulés africains laissés aux frontières Sud externalisées de l’Europe", Me Cheick Mangara, représentant de la Ligue pour la Justice et les Droits de l’Homme (LJDH) et de Me Amadou Diarra, a considéré tour à tour l’immigré (qui migre à la recherche d’un avenir meilleur), le clandestin (qui a la volonté de quitter son pays par tous les moyens sans respecter les règles) et l’irrégulier (d’abord immigré régulier, par expiration des papiers ou changement de lois, il devient irrégulier).

Il a pour l’essentiel dénoncé la violation des droits en tant que personne humaine, à la fois pour l’immigré volontaire, le candidat à l’émigration refoulé et le réfugié contraint à chercher le droit d’asile : détention arbitraire, contrainte corporelle, refoulement. Pour lui l’arsenal juridique tourne autour de la Déclaration Universelle des droits de l’homme, du droit d’asile dans les pays de destination et des récentes évolutions africaines qui permettent la saisine de la Commission Africaine des droits de l’homme. Si par exemple les droits sont violés au Maroc, il faut saisir les tribunaux marocains et prouver qu’on a épuisé toutes les voies de recours à ce niveau. C’est seulement alors qu’on peut déboucher devant la commission africaine des droits de l’homme. A ce cheminement, Me Cheick Mangara oppose la possibilité en Europe de saisir le conseil des Droits de l’homme à Genève.

Sa conclusion est qu’il n’existe pratiquement aucun suivi, aucune protection pour les subsahariens. Devant le constat cruel qu’il n’existe "pas de Droit spécifique pour les immigrés" Me Cheick Mangara suggère qu’il faut voir dans les différents instruments les parties qui peuvent être utiles aux migrants.


I-3 « Approche du co-développement, quelles stratégies ici et là-bas, démystification du mieux être ailleurs »

Intervention de Sékou Diarra, personne ressource de l’ONG Helvetas Mali, membre du collectif de soutien

Que faire ici et là-bas ?

Première interpellation-démystification : Pourquoi les migrants européens sont appelés chez nous des "experts", "investisseurs", "touristes" et qu’en Europe on crie à "l’immigration clandestine" s’agissant des Africains ?

Sékou Diarra a ensuite pris à partie une des deux banderoles affichée dans la salle qui se lisait comme suit : "Oui au co-développement, participatif, volontaire et réfléchi !" La coopération au développement existe depuis 35 ans, mais il y a en même temps pillage des ressources et la pauvreté continue. Le "co-développement" comme stratégie proposée ici et là-bas n’est pas séparable de la coopération au développement.

La définition de l’Etat français du co-développement est l’action favorisant la contribution des migrants au développement au bénéfice de leur pays d’origine. D’abord le concept n’est pas nouveau et son exécution initiale avec les financements des projets du GRDR (Groupe de Recherche pour le Développement rural) dans la région de Kayes a démarré dans les années 90. Certains de ces projets reflètent les intérêts des pays d’accueil.

Pourquoi assistons-nous aujourd’hui se demande Sékou Diarra à la multiplication des guichets de Western Union alors que selon les règles de l’OMC les marchandises peuvent circuler mais pas les hommes ?

Derrière le slogan du "co-développement, il y a la question de l’aide au développement". Or nous devons, souligne-t-il, réfléchir à l’avènement d’un "Mali sans aide publique au développement". Tous les projets qu’on agite prétendent lutter contre la pauvreté mais n’ont pas pour but de nous orienter vers le développement. L’exemple du micro-crédit qu’on nous présente comme la panacée endette plus les populations au lieu de régler les problèmes. Dès lors les projets mettent en jeu des mécanismes qui construisent et alimentent la même pauvreté.

Sékou Diarra nous engage par conséquent à rejeter le concept même "d’immigration clandestine". Environ "80%, souligne-t-il, de ceux qui se mobilisent pour partir ne le font pas volontairement". Et pour lui les "voies de sortie doivent toucher les causes structurelles des migrations".

Proposition à cet égard :

  •  Dire non au pillage de nos ressources. Où est le co-développement quand il ne nous reste que 20% des revenus de notre or et que l’on nous prend 80% de cette richesse ?
  •  Non à la fuite des cerveaux,
  •  annuler la dette, au remboursement de laquelle nous consacrons 14 dollars par personne, alors que nous ne consacrons pas 5% de nos ressources aux dépenses de santé,
  •  construire des relations commerciales équitables. Sékou Diarra constate que le commerce n’est ni libre ni équilibré. Nous produisons le coton dont vivent 3 millions de maliens, mais les prix d’achat du coton aux producteurs sont en dessous des coûts de production,
  •  combattre la corruption dont il se révèle qu’elle nous a privé de 2002 à 2006 de 103 milliards,
  •  développer un effort d’éducation des populations ici et au nord. Ici mettre l’accent sur l’immigration forcée, là bas mettre l’accent sur les ressources de l’Afrique qui quittent l’Afrique pour partir dans le Nord.

II Questions et interventions des participants

Le débat qui s’instaure s’ouvre par une série de questionnements ?

M. Konaté (journaliste ORTM) :

"Les expulsions continuent et nous laissons faire. De la conférence de Rabat à nos jours, qu’est ce qui a été fait et que faire ?"

Fakaba (journaliste – Le Malien) :

Quelle est la part de responsabilité de nos gouvernants ?

Y. Diallo (journaliste - Dunya (le monde) :

Ne faut-il pas élargir le thème et examiner "l’immigration dans ses contraintes et perspectives" ? Ne s’agit-il pas d’un problème national et d’un problème de développement, d’Etat ? Pourquoi l’absence des responsables administratifs et des ambassades accrédités à cette journée de réflexion ? Quel partenariat autour de la situation à Tinzawaten ? N’y-a-t-il pas la décentralisation et les communes ? L’AME ne doit-elle pas mettre l’accent sur la sensibilisation, couvrir les radios de proximité et développer le support médiatique en langue nationales ?

X. Gillet (site web "penserpouragir")

M. Gillet s’est dit d’abord "frustré d’entendre des revendications que nous ne sommes pas en mesure de demander". Il a fait ensuite le parallèle entre l’accueil de l’étranger ici, humain, touchant, et l’accueil en Europe inhumain. Il a fait le parallèle entre l’étranger pauvre, que l’on n’a pas toujours envie de recevoir et l’étranger riche, toujours bien accueilli. Pour lui, l’AME assume un rôle social pour la survie de personnes, rôle qui doit, à son avis être rempli et finançable. Mais il met en garde de ne pas choquer les financeurs avec des revendications. Il propose une réflexion sur les migrations choisies. Quelle émigration va servir le Mali pour son développement ? Pourquoi pas le principe de l’aller retour ? Est ce que le regroupement familial n’empêche pas l’immigré d’envoyer de l’argent à la famille restée au pays ? Il conclue en disant qu’il faut que les immigrés arrêtent de dire que « tout va bien ».

Les témoignages d’expulsés et de refoulés

  •  A. C., expulsé le 24 juin 2007, après un mois de séjour en centre de rétention, malgré une centaine de lettres et une marche de soutien témoignant de son intégration. Il est en France depuis 7 ans, a suivi une formation là-bas et travaille dans le domaine de l’informatique. Il a ressenti une vraie injustice par rapport à son statut « sans papier », il se dit torturé psychologiquement (il est resté menotté plusieurs heures sous le soleil, etc.). Il est arrivé au Mali sans ses effets.
  •  B. C, expulsé le 5 juillet 2007, s’est d’abord vu signifier sa libération au bout de 30 jours de centre de rétention avant de se voir expulser le même jour au nom d’un laisser-passer bizarrement obtenu à la dernière minute, un jour non ouvrable. Il se demande encore "est-ce que le consulat travaille le samedi à 13h " ?
  •  T. C., refoulé de l’ARTD (Association Retour Travail et Dignité) association constituée à la suite des vagues d’expulsion de Ceuta et Melilla a demandé : "est-ce qu’un laisser passer était valable sans la signature du titulaire et qui sont les passeurs ?"
  •  Y. C. : expulsé en 1997 est un ancien sans-papier de l’Eglise St Bernard qui porte en lui une révolte intacte :" Y en a marre. Il faut qu’on parle. Notre continent est riche, nous souffrons. J’ai été discriminé ici et là-bas, expulsé sans laisser passer. On n’est pas des esclaves et l’on doit pouvoir vivre partout sur la terre, sinon c’est chacun chez lui. Il rappelle qu’en 1991 le gouvernement de transition de l’époque a envoyé en France Tiébilé Dramé, alors ministre des Maliens de l’extérieur, pour mener campagne dans les foyers de travailleurs maliens en France dans le but de faire accepter "l’aide au retour" qui s’élevait alors à 2.000 francs français.
  •  T. D. : expulsé de France la veille de la Journée de Réflexion. Massicotier de profession, sans papiers avec 9 ans de séjour en France, marié, mais malade tuberculeux en soin, il a été arrêté alors qu’il allait renouveler ses papiers à la préfecture. Il a été expulsé le lendemain de son arrestation. Il a été passé à tabac, scotché et fourgué dans l’avion par 7 gendarmes qui lui soufflent en outre qu’il touchera 100.000 FCFA de la "Croix-Rouge française" à l’atterrissage. Intox dont il ne voit pas la couleur. Il pense que l’immigration choisie est un tri entre intellectuels et illettrés ; ces derniers n’ont aucun espoir.

Intervention de Mohamed Tabouré, journaliste au journal Sanfin, membre du collectif de soutien – appel de la journée


Thème:Co-développement ou co-expulsion :

Mohamed Taboure était chargé du rapport d’orientation générale et de synthèse de la journée de Réflexion.

Il a d’abord a récusé l’approche de Xavier Gillet contre les prétendues "revendications extrémistes". L’AME est selon lui, au contraire à féliciter pour cette journée, parce qu’elle est sur la bonne voie qui consiste à s’enquérir des réalités vivantes du terrain (à Tinzawaten), développer la réflexion sur les recours juridiques et finir la réflexion sur le contexte socio-économique et politique. Il y a bien là un effort de réflexion collective et autonome.

L’AME doit-elle accompagner les politiques officielles en matière d’immigration de l’Union européenne, la France et nos gouvernements ? Ou doit-elle les combattre ? Telle est la question posée !

Faut-il dire oui au co-développement ? Et qu’est-ce qu’est le co-développement ? Ca ne date pas d’aujourd’hui comme l’a rappelé Sekou Diarra. En fait, c’est un renforcement des politiques d’expulsion. M. Tabouré en conclue que co-développement = co-expulsion : d’un côté des Etats qui veulent se débarrasser de leurs immigrés et de l’autre des Etats qui coopèrent en faisant les gendarmes contre une contribution financière.

La lutte des immigrés maliens en France avait contraint Amadou Toumani Touré (ATT) à déclarer Nicolas Sarkozy persona non grata au Mali pour ses tentatives d’instaurer des accords de réadmission entre la France et le Mali du type de ce qu’il y avait entre la France et la Roumanie (convoyer dès le départ les sans papiers expulsés de France par des policiers maliens). Mais par la suite ATT a accepté au nom du "co-développement" de co-expulser les Maliens de France par la délivrance de laisser passer.

Des questions doivent être posées : quel est le rôle du gouvernement malien ? quels sont les accords entre le Mali et la France, le Mali et l’Espagne, le Mali et l’Union européenne ? Le gouvernement malien a sans doute des contradictions de façade avec ces gouvernements sur des sujets comme "la polygamie" et les "expulsions violentes", mais cela ne l’empêche pas de signer des accords qui sont plus ou moins secrets et laisser faire les expulsions souvent violentes et parfois « douteuses ». (doutes notamment sur les laisser-passer).

M. Tabouré a rappelé qu’en France, un immigré régulier peut devenir irrégulier à cause de lois de plus en plus restrictives et dans les contrôles policiers, c’est la parole du policier qui vaut sur la parole de l’immigré.

On ne doit pas être dupe des discours qui prétendent que la lutte contre l’immigration clandestine est la condition pour l’intégration des immigrés réguliers. Rappelons ici le cas de la jeune Malienne maman d’une fillette et qui a été expulsée de France au moment même du dernier voyage de Sarkozy au Mali. Elle a été expulsée bien que mère d’une Française de naissance. L’Etat français a été obligé, sous la pression d’une intense campagne de presse et de nombreux soutiens, d’ordonner le retour de cette femme victime de l’arbitraire policier pour la rétablir dans ces droits.

On assiste en France à la lepénisation des esprits et les lois anti-immigrés qui se succèdent en France fabriquent les clandestins et multiplient les expulsions. Nicolas Sarkozy, aujourd’hui Président de la République, assigne à son gouvernement et sa police de faire du chiffre. Le ministre Brice Hortefeux de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement planifie cette année 25000 expulsions et 125.000 remise en cause !

Le polygame qui a vécu trente ans en France avec ses papiers devient illégal du jour au lendemain. L’immigré est considéré comme responsable du chômage, du déficit de la sécurité, comme une menace à la sécurité de la France, des banlieues, comme un terroriste. Le mariage mixte est suspect et combattu. Les nouvelles lois exigent un délai de 4 ans pour confirmer la validité du mariage mixte.

Prétendre que l’immigré qui a sa famille en France envoie moins d’argent au pays parce qu’il s’occupe de sa famille et que par conséquent "le regroupement familial n’a pas que des conséquences positives pour le Mali" ne tient pas : pourquoi ne pas reconnaître franchement le droit au regroupement familial et permettre que l’homme et la femme travaillent ? Est-ce que cela ne ferait pas des revenus encore plus importants non seulement pour la famille en France, mais aussi pour le village et le Mali ? La restriction sur le regroupement familial est plutôt une façon de nier les droits et la liberté de circulation des personnes et surtout des femmes et compromettre encore plus le bien être, les revenus du ménage immigré, du village et du Mali ? Le fait est que les immigrés ne sont pas considérés comme des hommes et des citoyens à part entière. Alors qu’ils ont aussi des droits nationaux (le droit de se marier et regrouper sa famille, de vivre, parler, lutter et étudier dans leurs langues et selon leurs traditions nationales et aspirer à l’indépendance et au libre développement de leur pays d’origine) qui doivent être reconnus et respectés.

Où est donc le co-développement ? C’est plutôt la lutte contre l’émigration clandestine que l’on « habille » de co-développement.

Le gouvernement français est aujourd’hui en train de mener une politique de "diviser pour régner" qui la conduit à signer des accords séparés avec chacun des pays africains. L’Union européenne a annoncé une aide de 280 milliards de FCFA (426 millions d’euros) pour le Mali sur la période 2008-2013, pour dit-on “maîtriser les flux migratoires en luttant contre la pauvreté”. Les Etats-Unis pour leur part ont promis à ATT au titre du Millenium Challenge 230 milliards de FCFA pour développer les exportations de marchandises, maîtriser la terre, l’eau, l’agriculture au service des multinationales, de la bourgeoisie nationale et des propriétaires fonciers et la confisquer au détriment des jeunes et des femmes.

L’Union Africaine fait faillite devant l’Union européenne qui soumet l’Afrique à FRONTEX et sa surveillance maritime et aérienne des côtes africaines. Même les champions de l’unité africaine, la Libye notamment, sont les premiers à expulser sans ménagement les immigrés et se faire les sous-traitants de la lutte contre l’immigration clandestine. Nous les voyons en plus oeuvrer aux côtés de l’Union européenne et des USA pour faire main basse sur l’agriculture des pays africains. Après les 100.000 hectares livrés au CENSAD, la Libye vient de créer une société Malibya chargée de mettre en valeur 200.000 hectares à l’Office du Niger. C’est la voie libre pour l’agrobusiness et l’exportation agricole pour la Libye.

Nous ne pouvons apporter à un co-développement qui nous prive de nos ressources (or, coton) et qui, par des privatisations, confisque, après les entreprises, la terre et les moyens de production et, partant, le présent et l’avenir de la jeunesse. C’est un co-développement qui en fait développe la pauvreté.

Nous devons réfléchir à de véritables réformes agraires qui donnent gratuitement l’eau et la terre aux paysans, aux jeunes, aux femmes et aux expulsés et préparent les conditions pour, non seulement, assurer notre souveraineté alimentaire, créer des emplois, accumuler pour notre industrialisation nationale sans laquelle l’indépendance politique et économique, la souveraineté est un vain mot.

Interventions des communicateurs et conclusion

  • Sekou Diarra : pour l’AME, seul le rôle social n’est pas suffisant, le rôle revendicatif est important car on nous impose des politiques. Pour l’instant il n’y a pas de co-développement équitable. Le débat à l’AME doit être ouvert sur des solutions (ex : accès à la terre). Ceci doit être discuté avec d’autres acteurs de la société civile.
  •  Cheick Mangara : quand on bafoue les droits humains, on doit revendiquer ses droits.
  •  Ousmane Diarra fait un bref résumé de l’action l’AME, association composée seulement d’expulsés et de refoulés :
  1. Accueil des expulsés et refoulés
  2. Revendication, notamment manifestation lors de la venue de Sarkozy à Bamako
  3. Sensibiliser les populations
  4. Interpeller les autorités.

Nous nous rendons compte que le gouvernement malien néglige les expulsés : il arrive en moyenne 2 expulsés par jour de France, il n’y a aucune aide du Mali. Si un grand nombre d’expulsés viennent, le gouvernement malien va les accueillir pour questions de sécurité (d’Espagne par ex).

  •  Mahamadou Keita, secrétaire général de l’AME et chargé d’aller accueillir les expulsés à l’aéroport, rappelle que personne ne donne de l’argent à l’expulsé à son arrivée. C’est la police française qui fait courir ce bruit s’il en est. Il confirme que les expulsés arrivent la plupart du temps sans argent.

En conclusion, Mohamed Tabouré explique que la discussion était vraiment utile. Les témoignages des expulsés sont poignants et nous rappelle la réalité. Il rappelle que M. S., gréviste de la faim et expulsé de l’église Saint Bernard en 1996, retourné en France, est de nouveau en centre de rétention.

Il salue le travail de l’AME d’être aller jusqu’à Tinzawaten voir la réalité. Il rappelle la naissance de l’AME et sa longue lutte contre les expulsions en collaboration avec les mouvements du Nord. L’AME doit continuer sa lutte déjà éprouvée contre les expulsions d’Angola et de France pour la liberté de circulation et la développer.

Son travail jusqu’ici d’accueil et d’aide aux expulsés et aux refoulés a été soutenu par les seuls appuis financiers de Droits devant et la Cimade. Il ne fait aucun doute que ce rôle social appelle à la plus grande considération. L’AME est félicitée par les autorités administratives pour le travail qu’eux-mêmes ne font pas. L’AME pourrait être soutenue par des subventions publiques. Mais il doit être clair que l’association tient à garder son autonomie et garder sa liberté de pensée et d’action.

M. Tabouré repose la question à laquelle il faut chercher à répondre : quel est le rôle de nos gouvernements ? Il rappelle que le Maroc, l’Algérie et la Libye sont devenus les gendarmes de l’Europe et que l’on assiste à des drames tel celui des 27 clandestins accrochés à des filets de pêche dans la Méditerranée que personne ne voulait secourir se rejetant la responsabilité : véritable non assistance à personne en danger.

Il demande à considérer la proposition du journaliste Y. Diallo sur l’élargissement de la réflexion. L’AME, en même temps que son action sociale, syndicale, humanitaire, a un véritable travail de réflexion à mener.

Par Ousmane Diarra,

 Source : http://penserpouragir.org/

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Commentaires (1)

  • malle konate

    bonjours, laissez les jeunes tranquilles nos parents qui sont la-bas sont victime de tout cela, même moi je suis la route ;ma femme aussi et mes enfants ok bye