Pratique de l'excision à Kolda : Plus de 52 % des femmes favorables au couteau

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Ces abandons bidon de l’excision’. C’est le titre de la chronique intitulée ‘Moo nu soof’ de l’édition du lundi dernier de Walf-Grand’place (No 313). Un cri de dépit contre ces titres vaniteux qui annoncent l’abandon de l’excision dans tel ou tel village. Le chroniqueur n’a pas, à l’évidence, tort de s’emporter ainsi. En atteste la réalité dans la région de Kolda.

(Correspondance) - La dernière Enquête démographique et de santé (Eds-IV) de 2005 plutôt alarmante, justifie bien son indignation face à autant de triomphalisme devant un mal tenace. ‘Les résultats montrent qu’à Kolda, plus de 52 % des femmes pensent que l’excision est une pratique qui devrait être maintenue’, peut-on ainsi lire dans ce document. Une opinion bien aux antipodes de l’apparence affichée par les déclarations d’abandon.

Ce taux de la dernière enquête Eds est bien au-delà de la moyenne nationale, soit 17,6 %. En milieu rural, 55 % des femmes sont favorables à la poursuite de l’opération contre 18 % au plan national. La tradition a encore le vent en poupe dans la région de Kolda. L’excision n’est à Kolda un mystère pour personne. Elle est parfaitement bien connue des femmes (100 % selon la même enquête). Et que nombre d’entre elles, soit 94 %, reconnaissent avoir subi l’opération.
 

Les multiples campagnes de sensibilisation semblent n’avoir aucune prise sur la plupart des femmes. Qui croire alors dans les déclarations d’abandon ? D’autant que 64 % des enquêtées ont avoué avoir soumis une de leurs filles à la tradition. Sans état d’âme parfois ! ‘Pour 56 % des filles, l’excision a eu lieu entre 0 et 4 ans’, poursuit l’Eds IV de 2005. Il n’ y a donc point de doute, le chemin à parcourir pour arriver à bout de cette tradition est encore long.

En témoigne cette séance de sensibilisation de Fawe (une Ong) il y a deux ans à Marsassoum. Les animateurs ont essuyé les ‘tirs’ des parents et de quelques enseignants favorables à la poursuite de la pratique. ‘j’ai enfanté plusieurs fois, jamais je n’ai eu de problème !’, leur a lancé une dame. Le dernier pied-de-nez est celui de la nouveau-née âgée d’un mois, morte de l’opération. Une tragédie qui a eu lieu le 20 octobre dernier au village de Médina Diambéré (2 km à l’ouest de la commune de Vélingara), en milieu Soninké. L’auteur de l’excision, Mme Waïga Kanté, octogénaire, a été arrêtée par la Brigade de gendarmerie de Vélingara.

Selon une source proche des services de santé, le nourrisson n’a pas survécu à l'hémorragie et aux infections. La même source médicale précise que ‘la fillette souffrait d'une anémie sévère consécutive à l’hémorragie’. Un drame qui s’est produit en l’absence de la mère de la victime. La dame Waïga Kanté, tante du père de l’enfant, en a profité pour, sans doute donner libre cours à son autorité sur la victime. Parce que dans ces milieux traditionnels, l’oncle paternel ou la tante (sœur du père), ont une autorité sans entrave sur la progéniture de leur frère. Même sort pour la dame Païté Sané, bissau-guinéenne venue à Paroumba, dans la communauté rurale de Wassadou, présenter ses condoléances. Elle a été sollicitée par ses parents pour exciser onze fillettes de 3 à 7 ans. Elle sera condamnée à une peine ferme de 3 mois, douze autres prévenus dans cette même affaire s’en tireront avec 6 mois assortis du sursis.

Hamidou SAGNA, WalFadjri