Grand dossier- Karim multi milliardaire: l’expert en camouflage financier par Madiambal DIAGNE

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Son père Wade nous l’avait présenté comme un brillant expert financier, le seul, dans son gouvernement, a avoir le génie de diriger les ministères du ciel, de la terre et l’espace international et de l’énergie. Quand on prend connaissance des résultats de l’enquête le concernant, on découvre que Karim Wade est effectivement un as du camouflage financier. Dans la caverne de Ali Wade, pour reprendre Jean-Paul Dias, il s’est servi avec art de cabinet d’études de notaires, d’anciens camarades de classe, d’anciens et nouveaux copains et coquins, de son chauffeur, de son garde du corps jusqu’à la domestique de son ami, pour camoufler un business qui pue la dilapidation et le blanchiment d’argent à mille lieues de la ronde. On se demande aujourd’hui comment cela a pu se faire dans une Administration sénégalaise dont on se plaît ici à vanter le caractère républicain ; avec des Sénégalais dont on s’évertue à louer le patriotisme. Et si Wade le disait à sa maman !

Dp World Sa, propriété d’un société basée aux Iles vierges britanniques

Avec l’enseigne Dp World, on croirait que l’exploitation des activités portuaires au Sénégal était confiée à la firme de Dubaï appartenant à l’Emir. La réalité est tout autre. La société Dp World Dakar SA créée au cabinet notarial de Me Tamaro Seydi est la propriété, à hauteur de 86%, de Dp World Senegal Limited basée aux Iles vierges Britanniques. La lanterne des enquêteurs a été éclairée par les deux témoignages de la notaire Tamaro Seydi. Dp Wolrd Dakar Sa a été constituée pour un capital de 1 milliard de francs Cfa libéré par deux chèques provenant de Londres et de Monaco.

Quand Dp World Dakar Sa avait envisagé d’augmenter son capital social à 31 milliards de francs Cfa, Me Tamaro Seydi s’était précipitée auprès de Karim Wade pour éviter que la société change de notaire comme cela avait été envisagé. Ainsi, Tamaro Seydi réussira à garder son client et l’expliquera aux enquêteurs. D’ailleurs, l’augmentation de capital ne se fera pas. C’est dire que Karim Wade décidait de tout à Dp World Dakar Sa. La preuve, quand Mansour Gaye, expert-comptable patron du Cabinet Cice, avait voulu être désigné comme commissaire aux comptes de la société à sa création, c’était à Karim Wade qu’il s’était adressé. Mansour Gaye dit aux enquêteurs que Karim Wade lui avait opposé le fait que le cabinet Cice n’avait pas de signature internationale. C’est comme cela que Cice était allé chercher la signature internationale en intégrant le réseau de  Gran Thorton.
Le volet de l’enquête, relatif à Dp World Dakar Sa, montre que les conditions de concession du marché étaient scandaleuses. Après l’adjudication, tous les membres du comité restreint de sélection avait reçu chacun une gratification spéciale de 25 millions de francs payée par le directeur général du Port de Dakar, Bara Sady. Le même Bara Sady réalisera une opération encore plus étonnante. En effet, Dp World Dakar Sa devait payer un ticket d’entrée de 54 milliards 600 millions de francs. Bara Sady proposera à Dp World Dakar Sa de ne payer que 30 milliards de francs Cfa et de permettre ainsi au Port autonome de Dakar d’entrer dans le capital à hauteur de 10% et que les 24 milliards 600 millions serviraient de mise du Port de Dakar. En d’autres termes Bara Sady fait acheter par le Port de Dakar, à 24 milliards 600 millions, l’équivalent de10% du capital d’une société créée avec 1 milliard. L’opération a été réalisée dans ces conditions et le Parquet spécial de la Crei se demande comment on peut troquer 24 milliards 600 millions de francs Cfa contre une valeur de 100 millions de francs Cfa. Est-ce que la différence est perdue pour tout le monde ? Interrogé sur les motivations d’une telle opération, Bara Sady dit simplement qu’il escomptait dans le futur, des dividendes pour le compte du Port autonome de Dakar.

La main basse des sociétés offshore sur l’aéroport

Karim Wade décidera de la modification de la structure du capital des Ahs. Ainsi, il avait été procédé à des cessions d’actifs qui ne sont plus nominatifs mais au porteur. Madeleine et Paul Sarr signeront les documents nécessaires. Bibo Bourgi et Pape Mamadou Pouye seront les visages de l’actionnariat des Ahs. Soit dit en passant que Elimanel Diop avait lui aussi fini d’être écarté de la gestion de l’entreprise. Deux sociétés offshore seront créées. Ce seront Menzies Africa basée au Luxembourg et Ahs International Limited basée aux Iles Vierges Britanniques.

Menzies Africa deviendra Menzies Middle East and Africa quand cette entreprise avait obtenu un contrat de Handling en Jordanie. Menzies Middle East and Africa et Ahs International Limited contrôlent désormais Ahs à plus de 99%. Karim Wade a utilisé sa position de ministre des Transports aériens pour donner des coups de main déterminants pour les bonnes affaires de Ahs. Ainsi, a-t-il pris un arrêté imposant à toutes les compagnies aériennes, en escale à Dakar, un minimum à payer aux sociétés de Handling. Les compagnies aériennes avaient protesté en vain. Elles continuent jusqu’à présent, à chaque atterrissage et décollage, de payer des services à Ahs sur des comptes bancaires au Niger et dans d’autres pays.
Un autre témoignage, tout aussi renversant, a été fait sur la gestion des Ahs. C’est celui de Noël Deconnick, le fa­meux «belge» dont se souvenait vaguement Karim Wade.
Noël Deconnick avait été placé à Ahs par Menzies Aviation, l’une des plus grandes firmes mondiales de Handling. Le contrat signé par Elimanel Diop prévoyait que Ahs reverserait 7% de son chiffre d’affaires à Menzies Aviation qui, en contrepartie, apporterait une assistance technique et lui permettra d’utiliser ses enseignes et ses procédures. Ainsi, Noël Deconnick, qui représentait à Dakar les intérêts de Menzies aviation, officiait au Sénégal comme directeur des opérations à Ahs. Avec l’expansion des activités de cette entreprise, Noël Deconnick deviendra directeur général d’Ahs Ghana, puis d’Ahs Jordanie.
Du temps où il était directeur des opérations, Noël Deconnick avait comme interlocuteurs Bibo Bourgi et Pape Mamadou Pouye qui, dans la structure du capital, se faisaient respectivement appeler HQ1 et HQ2. Dans la vie civile, Noël Deconnick connaissait ces personnes sous d’autres noms. Pape Mamadou Pouye se faisait appeler Albert et Bibo Bourgi portait le nom de Abraham Rosendhal. Noël Deconnick ne connaissait pas leur véritable identité. Il raconte qu’un jour, il avait rencontré à la Pointe des Almadies Karim Wade et «Albert» accompagnés de deux dames et quand il voulait s’avancer pour saluer «Albert» ce dernier l’en a dissuadé d’un geste de la tête. Cet incident lui vaudra le lendemain des remontrances de la part de sa maison-mère Menzies de Londres. Noël Deconnick vit à Dakar où il exerce une activité de consultance et s’est marié avec une Sénégalaise.

Les scandales Daport, Aerobus et Sénégal Airlines

Le grand public avait toujours cru que la société Daport qui est censée opérée sur la plate-forme de l’aéroport de Dakar est une filiale de la société Fraport qui gère l’aéroport de Francfort. Que nenni ! Daport est contrôlée à 99% par une société du nom d’Afriport basée au Luxembourg. Les enquêteurs ont été effarés de constater que Daport n’a même pas de siège social au Sénégal. Elle continue d’élire domicile au Cabinet de Me Tamaro Seydi où jusqu’à ce jour, des courriers lui sont envoyés. La société Afriport avait été représentée à la constitution de Daport par une certaine Coumba Diagne habitant le quartier Hlm 4 à Dakar. Quand les gendarmes s’étaient rendus à l’adresse indiquée, la mère de Coumba Diagne leur dira que sa fille vit désormais aux Etats-Unis d’A­mé­ri­que. Le Quotidien a pu établir que Coumba Dia­gne est une ancienne employée de Bibo Bourgi.

L’examen des comptes de Daport montre des opérations curieuses. Les aéroports du Sénégal (Ads) ont procédé à des virements cumulés au profit de Daport d’un montant de 2,5 milliards de francs Cfa sans aucune contrepartie. Daport est payée à ne rien faire par les Ads. On retrouve aussi dans les comptes de nombreux paiements faits pour le compte de Me Rasseck Bourgi, avocat conseil de Karim Wade. Mais le plus grave, aura été l’opération réalisée entre les deux tours de la Présidentielle de 2012. L’agent comptable des Ads, M. Konaté, sans titre ni qualité, a souscrit un prêt au nom des Ads auprès de Ecobank pour un montant de 1,3 milliard de francs Cfa entièrement reversé à Daport.
L’autre exemple, qui montre que la plateforme de l’aéroport de Dakar est une vache à lait pour Karim Wade et ses amis, est celui de la société Aérobus Services dont les bus transportent les passagers au débarquement et à l’embarquement. Cette société a été constituée par deux personnes : un ancien employé de Bibo Bourgi à la retraite du nom de Alioune Samba Diassé et Véronique Lély Manga, la domestique de la mère de Pape Mamadou Pouye, un camarade de classe de Karim Wade au cours Sainte Marie de Hann. Les enquêteurs rient encore de cette découverte d’une domestique qui possède une compagnie de bus. Entendu, Alioune Samba Diassé dira ne rien savoir de la société. Il avait simplement signé des documents à la demande de Bibo Bourgi. Véronique Lély Manga, n’en parlons pas ! Elle a cédé ses actions à une société basée aux Iles Vierges Bri­tan­niques intitulée ABS Corporate qui se trouve être la représentante exclusive en Afrique de l’Ouest de la marque Cobus fabriquant des bus qui opèrent à l’aéroport de Dakar.
Le montage financier du capital de Se­ne­gal Airlines est tout aussi rocambolesque. Bibo Bourgi, toujours lui, a fait venir une de ses sociétés créées au Panama, la GB Venture pour porter ses actions dans Ap Holding constitué avec Abdourahmane Ndiaye patron de Sagam et Cheikh Mbacké Sèye patron de Touba oil.

L’histoire de Bmce et Aibd

Bmce est une société marocaine spécialisée dans l’ingénierie financière. Karim Wade l’avait fait venir au Sénégal et créera Bmce Capital que va diriger Adnan Chemanti. Bmce Capital est la propriété de Bmce Maroc et d’une société de droit Luxembourgeois Mit Invest Equity Sa. Le premier commissaire aux comptes appartenant au Cabinet Price Waterhouse sera rapidement viré. Il s’était montré curieux de con­naître l’identité des actionnaires de la société. Il sera remplacé par Oumar Samb du Cabinet Fideca.

Bmce Capital a réalisé le montage financier de l’Aéroport international Blaise Diagne (Aibd). Aussi, du temps où Karim Wade était ministre de l’Energie, ce cabinet gagnait-il tous les marchés d’ingénierie financière de la Senelec. Les enquêteurs ont dé­couvert que Me Tamaro Seydi, qui avait procédé à la création de Aibd Sa, tenait Karim Wade régulièrement informé des activités de cette société alors que sur le plan statutaire, Karim Wade ne devait avoir aucun lien avec cette activité. Les enquêteurs ont trouvé que Tamaro Seydi faisait copie à Karim Wade, entre novembre 2005 et février 2006, des courriers électroniques envoyés à Serge Yannick Nana, directeur général adjoint de Bmce Capital. Tamaro Seydi a expliqué qu’elle envoyait les comptes rendus à une liste de correspondants qui lui avait été donnée.
Karim Wade éjectera les Ma­rocains de Bmce Capital pour changer le nom de la boîte qui deviendra Black Pearl finance SA.  Cette nouvelle société est détenue par deux sociétés de droit luxembourgeois à savoir Mit Invest Equity Sa et Decro Sa. Entendue sur cette opération, Tamaro Seydi dira que l’argent nécessaire pour la constitution de la société avait été fourni par Karim Wade. Black Pearl Finance sera au cœur de toutes les opérations financières de l’Etat du Sénégal. Pressé de questions par les enquêteurs, l’expert-comptable Mansour Gaye se soulagera en leur suggérant de voir du côté de Black Pearl finance. C’est dire !

Enrichissement illicite – Le patrimoine immobilier de Karim Wade acquis entre 2004 et 2012

Les enquêteurs ont identifié des biens immobiliers immatriculés au nom de Istar Immobilier dont deux terrains d’une superficie totale de 5 000 m2 à côté du Hangar des pèlerins et sur la bande verte. L’enquête a pu établir que Karim Wade a acquis deux autres villas, de part et d’autre de la maison familiale des Wade au Point E. L’une des villas a été acquise auprès de la Société nationale de recouvrement (Snr) pour une modique somme. L’autre villa a été acquise auprès d’héritiers d’une famille d’origine capverdienne. Il est à distinguer que la villa familiale du Point E reste au  nom de Abdoulaye Wade et de son épouse Viviane. Cette villa n’est pas prise en compte dans la mise en demeure, par contre les deux villas achetées par Karim Wade y figurent.

Karim Wade dispose d’un immeuble R+4 flambant neuf sur la Rue 10 à Dakar. Il a confié aux enquêteurs qu’il comptait y loger les collaborateurs de son père à leur retraite. Le montage d’Eden Rock, un complexe constitué d’appartements de haut standing à l’ancien Boulevard Roosevelt à Dakar-Plateau, stupéfie les enquêteurs. A l’origine, il s’agissait d’un terrain de 1 392 m2, appartenant à Abdou Mody Ndiaye, un retraité de Rufisque. L’Etat avait procédé à un échange du terrain contre une villa à Rufisque pour une valeur estimée de 87 millions de francs. Le général Lamine Cissé, ancien ministre de l’Intérieur, bénéficiera d’un bail emphytéotique sur ce terrain. Quand Karim Wade a voulu du terrain, le général Cissé a été vite dégagé par une procédure d’échange de terrains. Ainsi, Bibo Bourgi héritera du terrain pour une valeur de 250 millions de francs. Quelques mois plus tard, précisément en fin 2004-début 2005, six nouveaux titres de propriété foncière ont été créés pour le compte de Bibo Bourgi sur les autres espaces de 7 000 m2 qui se trouvaient sur le même site. Pour ces nouvelles terres, Bibo Bourgi ne payera que 117 millions de francs Cfa. Il érigera donc le complexe Eden Rock sur la superficie totale de plus de 8 300 m2. Les appartements de luxe y sont vendus entre 650 millions et 750 millions de francs l’unité. Des acquéreurs interrogés par les enquêteurs ont affirmé que c’est Karim Wade qui avait joué à l’agent immobilier pour leur vendre les appartements. On retrouve aussi dans le complexe, des appartements appartenant à six sociétés créées au Panama. Bibo Bourgi, interrogé sur ces sociétés, a déclaré en être le propriétaire.
Il a été fait cas dans l’enquête de l’existence de deux appartements à Londres qui appartiendraient à Karim Wade et qui les aurait déjà revendus. La Crei n’a pas encore installé ces appartements dans la procédure faute d’avoir fini de retracer la propriété. Par contre, les enquêteurs ont pu établir que Karim Wade possède un appartement à la rue de la Faisanderie dans le 16ème arrondissement de Paris. La gouvernante de ses enfants vit dans cet appartement. Karim Wade a aussi acquis à la rue Emile Meunier, dans le même quartier chic du 16ème] arrondissement de Paris, deux ap­partements au 4ème et 5ème étage. Il en a fait un duplex. Bibo Bourgi le représente dans le syndic de copropriété.

Mimran offre 500 millions en 2000 à Karim Wade

L’enquête a évoqué une villa à Saint Tropez en France. Karim Wade y prenait régulièrement ses aises et allait dîner au célèbre Nikki Beach. L’enquête a permis d’établir que la villa appartient à l’industriel Jean-Claude Mimran qui la lui prêtait. De même, les enquêteurs ont pu établir qu’à son retour à Dakar, après l’élection de Me Abdoulaye Wade, Karim Wade s’était vu offert la rondelette somme de 500 millions de francs Cfa par le même Jean-Claude Mimran, histoire dit-on de l’aider à se faire une santé financière. Cela fait sourire car Karim Wade a déclaré aux enquêteurs qu’il disposait déjà en 2000 d’un patrimoine évalué à 8 milliards de francs Cfa.
Il a également été question dans les auditions de la gendarmerie de l’appartement dans lequel vivent les enfants de Karim Wade à l’Avenue Victor Hugo, dans le 16ème arrondissement de Paris. L’enquête a établi que l’appartement est au nom de l’homme d’affaires Abbas Jaber.

Enrichissement illicite – Les comptes bancaires déjà découverts

Noël Deconnick a fourni d’importants documents aux enquêteurs dont certains retracent des virements financiers des comptes de Ahs vers un compte au nom de Menzies Middle East and Africa à la banque Ing Behring de Monte Carlo pour des montants de 1,791 million de dollars (900 millions de francs Cfa) et 2 millions d’euros (1,300 milliard de francs Cfa). Le Procureur spécial de la Crei a envoyé au procureur général de Monaco, une demande d’entraide judiciaire pour retracer les opérations sur ce compte.

Un juge de Monaco a déjà été saisi pour travailler sur ces opérations tout comme il cherche à élucider d’autres virements bancaires effectués cette fois-ci directement par Karim Wa­de. Le fils du Président Wade avait effectué les 4 et 23 avril 2007, deux virements bancaires de 2 millions 7 mille dollars chacun, soit un total de 4 millions 14 mille dollars (2 milliards de francs Cfa) à partir d’un compte à son nom propre, ouvert à la Hsbc Saint Helier, Jersey Channel Islands vers un compte ouvert au nom de Karim Wade domicilié à Ing Behring Bank à Monte Carlo. La découverte de ces deux dernières opérations a été faite par les investigateurs du Fbi qui ont collaboré avec leurs collègues sénégalais. Les Américains songeraient d’ail­leurs à ouvrir des poursuites judiciaires pour blanchiment d’argent contre Karim Wade.  Les enquêteurs s’intéressent aux relations d’affaires de Karim Wade avec Sylvain Cohen, nommé par le Président Abdoulaye Wade comme Consul honoraire du Sénégal à Monaco.
Sur les comptes de Karim Wade au Sénégal notamment à la Sgbs et à la Cbao, les enquêteurs ont retracé des dépôts cumulés en espèces et hors revenus légaux de 910 millions 238 mille francs. Ces sommes étaient versées par Victor Tendeng, Victor Kantoussan, Elisabeth Dior Felhio assistante de Karim Wade, un certain Mouhamed Ba et d’autres personnes que Karim Wade affirme ne pas connaître. L’en­quê­te ne réussit pas encore à établir l’origine des fonds surtout que les versements s’étaient régulièrement poursuivis jusqu’en octobre 2012, soit plus de six mois après le départ du Pré­si­dent Wade du pouvoir. Karim Wade avait expliqué aux enquêteurs que ces sommes lui étaient données par le Président Wade sur ses fonds politiques mais interpellé sur les versements effectués entre avril 2012 et octobre 2012, il a donné une réponse qui laisse les en­quêteurs sur leur faim. Karim Wade a expliqué que c’était de l’argent qui lui restait à domicile et qu’il avait demandé à ses collaborateurs de les déposer de temps à autre dans ses comptes bancaires.

Istar Immobilier, Istar capital et Cd Media dans l’escarcelle de Wade fils

Les enquêteurs ont reçu un signalement précisant que plus de 30 milliards de francs Cfa dormiraient encore dans des comptes de Istar Capital à l’étranger. Le Procureur spécial Alioune Ndao a demandé une entraide judiciaire internationale pour s’assurer de la véracité de l’information. Pour l’heure, l’enquête a établi que la société immobilière Istar immobilier a bénéficié d’affectations de terrains respectivement de 5 000 m2 à côté du hangar des pèlerins à Yoff et de 3 000 m2 sur la Bande verte qui jouxte la façade Sud de l’aéroport de Yoff.

Les circonstances de ces cessions de terres appartenant à l’Etat sont tout aussi rocambolesques. En effet, c’est Tahibou Ndiaye, ancien directeur du Cadastre qui s’était occupé de toute l’opération d’attribution jusqu’à payer directement les frais de mutation. Interrogé sur cette opération, Tahibou Ndiaye invoquera une amnésie.

Le montage du groupe de presse Cd Media éditeur du journal Le Pays et du site internet lesénégalais.net, indique que sur le papier 30% des parts appartiennent au journaliste Cheikh Diallo et 70% à Atlantic Holding de Patrick Joseph Williams. Entendu une première fois, Cheikh Diallo, qui sans doute ignorait que Me Patricia Lake Diop et Patrick Joseph Williams avaient déjà été entendus, laissa croire qu’il était l’unique propriétaire de la boîte. A la deuxième audition, pressé de questions et confondu par un reçu de versement des sommes par Victor Tendeng pour la création de la société, Cheikh Diallo changera de stratégie de défense et met tout sur le dos de Karim Wade. Cheikh Diallo affirme n’avoir aucun lien avec M. Williams et que c’est Karim Wade qui lui a demandé de porter des actions. Ainsi, il reconnaît n’être qu’un employé payé par Karim Wade. Le directeur de publication du journal Le Pays d’ajouter que pour la gérance, Karim Wade a recruté l’ancien greffier Me Mamadou Diop, qui avait été gérant du Groupe Futurs Médias. Mamadou Diop a lui aussi été entendu et confronté avec Cheikh Diallo. Ils ont admis, tous les deux, être cosignataires des actes de gestion de Cd Media à la demande de Karim Wade. Leurs déclarations ont permis de mesurer l’implication de Karim Wade dans la gestion du groupe de presse. Ainsi, Mamadou Diop dira avoir été recruté directement par Karim Wade. Quand ce dernier avait sollicité ses services, Mamadou Diop qui avait quitté le Groupe Futurs Médias, travaillait avec l’homme d’affaires Cheikh Amar qui comptait mettre sur pied un groupe de presse. Selon les dires de Mamadou Diop, Il avait fallu que Karim Wade demandât à Cheikh Amar d’autoriser Ma­ma­dou Diop à aller travailler pour un autre projet d’entreprise de presse. «C’est avec Karim Wade que j’ai discuté de mon salaire à l’immeuble Tamaro et c’est lui-même qui m’avait appelé pour me dire de récupérer auprès du concessionnaire un véhicule Ford Edge», a-t-il précisé à l’enquête. Mamadou Diop précisera aux enquêteurs qu’en le recrutant, Karim Wade lui avait fait comprendre qu’il ne faisait pas confiance à Cheikh Diallo quant à la gestion de l’argent de l’entreprise. Cheikh Diallo et Mamadou Diop seront aussi unanimes en affirmant aux enquêteurs que la société Cd Media avait bénéficié de contrats de sponsoring de la part de certaines entreprises publi­ques. Aussi, après le départ du Président Wade du pouvoir, Karim Wade pourvoyait-il régulièrement aux moyens de fonctionnement de l’entreprise notamment le paiement des salaires pour un montant d’environ 7 millions de francs Cfa par mois. Victor Tendeng apportait chaque fois les sommes nécessaires. Le dernier versement avait été reçu le 5 février 2013.

lequotidien.sn

Madiambal Diagne