Des banques françaises soupçonnées d'avoir blanchi de l'argent "sale" africain

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Teodoro Nguema OBIANG

Ce Matin, mardi 2 décembre, Me William Bourdon a porté plainte, au nom de Transparency International, pour détournements de fonds publics de la part de plusieurs dirigeants africains sur le sol français dont Omar bongo (Gabon), Denis Sassou Nguesso (Congo-Brazzaville), et Teodoro Obiang ( Guinée Equatoriale).

Cette plainte s'appuie notamment sur un rapport américain qui vise la présidence de Guinée Equatoriale. Lesinfos.com vous dévoile le contenu de ce rapport qui s'interroge sur des banques françaises.

Près de 2 mois après le démantèlement de Fortis, voilà une « nouvelle bombe » - révélée par lesinfos.com - qui va exaspérer un peu plus des milliers d’actionnaires de l’ancien groupe financier.

Ici, il ne s’agit pas de gestion catastrophique, ni de dépenses astronomiques pour un déjeuner mais d’investissements douteux de la part de dirigeants africains en France via des banques qui ont récemment défrayé la chronique…

Réunion Ultra secrète

18 septembre 2007, Nanterre. Le patron de l’Office Central pour la répression de la grande délinquance financière, Christophe Perez – Baquey ainsi que le vice procureur de Paris Jean Michel Aldebert sont invités a une étrange réunion. A leurs cotés siège une délégation américaine : des agents de l’ambassade et 3 enquêteurs de l’ICE, Immigration and Customs Enforcement.

Au menu : le SOS des Américains en direction de la France. Ou pour être plus précis une demande d’entraide.

Personne ne doit savoir. Les Américains ayant demandé expressément la confidentialité dans leur note de 14 pages. « Étant donné le caractère délicat de cet examen qui implique des personnalités étrangères publiques de haut rang (…) Nous vous demandons de bien vouloir garder strictement confidentiel l’objet de la présente demande et l’existence d’une investigation américaine à ce sujet ».

Pourquoi tant de prudence ? La « cible » est importante. La section chargée du blanchiment d’argent et l’office du contrôle des douanes s’intéressent au « présumé criminel » Teodoro Nguema Obiang. C’est le Ministre de l’Agriculture et des Forêts en Guinée Equatoriale. Il est aussi et surtout le fils du Président qui lui aurait offert son fauteuil, selon le rapport.

La teneur des investigations est assez simple.

On le soupçonne de « laver » son argent sale en France.

Argent sale ? Pour le fils du président, les enquêteurs se sont fait leur petite idée en remontant dans le passé.

L’argent de l’Or vert

Depuis 2004, Teodoro Nguema OBIANG a fait l’objet de différentes enquêtes gouvernementales américaines.

Lors de ses précédentes investigations, les enquêteurs ont effectué une véritable radiographie du pays. Ils ont décortiqué notamment l’économie de l’Or vert : l’exploitation du bois au deuxième rang des produits de base exportés de la Guinée équatoriale.

Résultat : en charge des Forêts, « Teodoro Nguema OBIANG est suspecté d’avoir imposé sur le bois une lourde taxe révolutionnaire en insistant que les paiements, en argent liquide ou avec chèque au nom (…) d’une société forestière appartenant a Teodoro Nguema Obiang soient faits directement à lui. »

Autre source d’inquiétude pour les USA : devant la Haute Cour de L’Afrique du Sud, au mois d’août 2006, Teodoro Nguema Obiang a effectué une déclaration ambiguë. Déclaration écrite dans laquelle il reconnaissait « un ministre finit avec une part importante du prix du contrat dans son compte en banque ».

Aux yeux des enquêteurs d’outre-atlantique, cela laisse entendre « qu’il recevrait des dessous-de-table ou des fonds d’extorsion sous forme d’un pourcentage sur le revenu des contrats »…

Résidence à Malibu, Jet de luxe et Bugatti

Les Américains ajoutent que leurs investigations sur leur cible ont permis d’identifier «de nombreuses transactions suspicieuses prenant leur origine dans ou passant par le système financier français. »

Avril 2005. Teodoro Nguema Obiang est le donneur d’ordre de 5 virements télégraphiques différents.Chacun pour un montant de 5 908 400 dollars depuis la société générale de Banque en Guinée Equatoriale sur le compte 2001…. À la Banque de France. Selon le rapport, « aux moyens de ses transactions, Teodoro Nguema Obiang a pu transférer aux Etats-unis 29 542 000 dollars en un seul mois. Certains de ces fonds auraient servi à acheter la résidence à Malibu en Californie ».

Du 9 mai au 19 juin 2006, 6 virements sont effectués depuis un compte de la Banque de France. Montant : 33 799 999, 99 dollars, précise-t-on dans le rapport d’enquête américaine.

Une bonne partie de ces fonds aurait servi – selon ce même rapport américain - à l’achat d’un Jet de luxe d’un montant de 33, 8 millions de dollars.

Propriétaire d’un patrimoine immobilier à Paris, Teodoro Nguema Obiang est soupçonné d’avoir également effectué des virements vers la France depuis les Etats-unis pour l’achat d’une Bugatti évaluée à plus d’un million de dollars.

Fortis et Natixis soupçonnées

Dans le rapport des USA, on précise qu’entre novembre 2006 à juin 2007, « le blanchiment d’argent présumé s’est poursuivi à travers un intermédiaire ».

« Il semble que les fonds passaient par une ou deux banques en France avant d’arriver sur le compte en fidéicommis avocat/client numéro 0720….. Chez Union Bank of California. »

Et les Américains de citer deux virements télégraphiques. Le 24 novembre 2004, et le 10 mai 2007 « par la Fortis Banque France, 29 – 30 Quai de Dion Bouton à Puteaux » . D’un montant de 199 943 dollars.

« De plus, deux virements télégraphiques sont passés par Natixis ( anciennement Natexis Banques Populaires) Charenton le Pont à Paris, France. Le premier virement pour une montant de 199 906, 21 dollars, en date du 5 avril 2007 et le deuxième pour un montant de 199 906, 10 dollars, en date du 6 juin 2007. »

Ces investigations américaines n’ont pas ému, semble t il, les juges français. La justice française a classé l’affaire pour infraction insuffisamment caractérisée. Madame Rachida Dati , garde des Sceaux – logiquement informée - a t elle répercuté l’affaire à Nicolas Sarkozy ? Le chef de l’Etat qui, le 30 septembre dernier, recevait les patrons des plus grandes banques françaises.

 

Par Xavier Bénéroso Béjarano en exclusivité pour lesinfos.com