Débat sur la création d'une « aide à la réinsertion » des vieux migrants

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Un amendement sénatorial soutenu par Jean-Louis Borloo va être discuté lors de l'examen du collectif budgétaire. Objectif : permettre à plus de 40.000 étrangers retraités de retourner chez eux en continuant de percevoir leur aide au logement.

Jean-Louis Borloo a de la suite dans les idées. Depuis des mois, le ministre de la Cohésion sociale défend la nécessité d'aider les vieux travailleurs immigrés à retourner chez eux sans tout perdre, à savoir, en particulier, leur minimum vieillesse. Ce qui permettrait de libérer des places dans des foyers Sonacotra surchargés, où la moitié des locataires ont plus de cinquante-cinq ans. Mais les autres ministères concernés (Finances, Santé) n'ont eu de cesse de lui mettre des bâtons dans les roues, en soulignant l'impossibilité d'« exporter » le minimum vieillesse, dont la perception, comme tout minimum social (RMI, AAH, etc.) qui n'est pas lié à contribution, implique d'être résident en France au moins neuf mois par an. De fait, toute dérogation à ce principe constituerait un précédent risqué, aussi bien sur un plan juridique que financier. La création d'une allocation spécifique garantissant le même niveau de retraite, un temps envisagée, a donc été écartée. 

Aider les vieux travailleurs immigrés à retourner chez eux ...

Mais Jean-Louis Borloo revient aujourd'hui à la charge avec un autre dispositif, assez similaire sur le fond, quoiqu'un peu moins ambitieux. Il soutient un amendement du sénateur du Cantal, Pierre Jarlier (UMP), déposé dans le cadre du projet de loi de Finances rectificatif dont l'examen commence aujourd'hui au Sénat, qui prévoit la création d'une « aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine ». Son montant serait « équivalent à celui de l'aide au logement dont ils bénéficiaient », à savoir l'aide personnelle au logement (APL) ou l'allocation logement à caractère social (ALS), et dépendrait donc toujours des ressources de la personne. Cette aide, dont il est bien précisé qu'elle est « exclusive des minima sociaux », serait réservée aux étrangers de plus de 65 ans vivant seuls et résidant régulièrement en France depuis plus de quinze ans, soit un public potentiel de « 42.444 personnes ».

Le gouvernement divisé


Autre condition : l'engagement à effectuer des séjours de longue durée dans leur pays d'origine (« dans des conditions à définir par décret »), sachant que 85 % de ces travailleurs migrants arrivés dans les années 1970 y ont toujours leur famille. Cela permettrait de généraliser les locations alternées dans les foyers et résidences sociales, expérimentées par la Sonacotra, qui permettent à 4 personnes de loger alternativement dans la même chambre, à raison de trois mois par an. Il s'agit, en outre, d'« une reconnaissance des sacrifices consentis par ces travailleurs au développement économique de la France », justifie l'amendement.

Il reste, cependant, à résoudre la question du financement de cette aide, qui serait versée par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations. Si le sénateur affirme « qu'aucune charge nouvelle ne sera créée pour l'Etat » puisque les intéressés percevaient déjà l'aide au logement, les nombreuses places libérées seront aussitôt occupées, avec, à la clef, des charges d'APL et d'ALS supplémentaires. Il faudra donc qu'en séance le gouvernement, qui reste divisé sur l'opportunité de ce dispositif, lève le gage financier. Pour ce faire, Jean-Louis Borloo doit encore convaincre son homologue du Budget, Jean-François Copé, qui siégera sur les bancs du Sénat.
ÉTIENNE LEFEBVRE, L'EXPRESS