Cri de coeur : Bakel, une cité perdue sous les cendres de l'oubli

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Bakel vit des heures difficiles. C'est un euphémisme de le dire. M. Ibrahima Malal Diaman avait bien vu quand il alertait l'opinion en ces termes : «Bakel sous les cendres de l’oubli », BIFAN, Série B, Tomme XXXI, 1, Janvier 1969". Depuis quelques années, le décor reste le même. Pire, l'avenir s'assombrit davantage. Les cœurs sont meurtris." Bakel bouge " me dit-on ! Je ne veux pas verser dans le dénigrement mais cela me fait ricaner. Bakel que je vis courant Septembre agonise plus qu'autre chose et cherche difficilement une issue de secours. Plusieurs secteurs sont à la traine. Les Libéraux se glorifient d'avoir goudronnés les grandes artères de la ville. Youpi ! Sautons au plafond ! C'est vrai que c'est un excellent investissement politique.  Un futur argument électoral de nos farceurs de policitiens. Loin de tourner en dérision cette réalisation, oh combien utile à la communauté, permettez-moi de pester !

Ces artères bitumées que je vis ressemblent plus à une embellie qu'à une vraie réalisation. Payons pas chère sa peau ! Le bitume est de très mauvaise qualité. C'est plus une fine couche de granulats posée sur de la latérite qu'un goudron digne de ce nom. Monsieur le Sénateur Yougoukhassé KONATE, permettez-moi de vitupérer ! Pester parce que non seulement la réalisation dont vous vous glorifiez n'a pas été à la hauteur des espérances, mais pire elle s'inscrit plus dans une logique de politique politicienne plutôt qu'à une réelle volonté de doter Bakel d'infrastructures. D'ailleurs, c'est le seul argument qui s'arrache des bouches libérales face à des critiques sur l'impact du régime Wadiste à Bakel.

Plus surprenant, les membres de votre parti (Parti Démocratique Sénégalais ) se tirent dessus à boulets rouges. Au grè des positionnements politiques, vos camarades de parti dont la Mairesse Aminata DIALLO prennent le peuple Bakélois en otage et douchent nos espoirs. Comment les pontes de votre parti à l'échelon national peuvent vous craindre dans ce tintamarre indescriptible ?

Vous disiez dans un interview accordé à Bakelinfo.com que votre rôle de Sénateur vous élève au rang de sage. Avez-vous oublié que l'union fait la force ? Un B.A.BA de la vraie sagesse. Faire front commun pour avoir une seule voix. Wade, si hébété soit-il, ne peut vous prendre au sérieux si vous vous coupez l'herbe sous vos propres pieds au grè des calculs politiques. Aminata DIALLO n'a rien fait à Bakel. C'est une tautologie de le dire. Même l'étranger qui arrive à Bakel ressent facilement ce fiasco. La foirade est cuisante ! L'espoir des Bakélois s'est noyé dans dans les eaux profondes de " Balakounme " .  

Comment une Mairesse instable peut apporter des solutions idoines aux problèmes d'une ville dont elle partage rarement les difficultés ? Elle connait plus l'actualité de son paisible quartier  dakarois que le quotidien Bakélois. Mais, dans les tous cas, son bilan sera celui du parti démocratique à Bakel. L'échec est partagé. Ce fiasco est celui du régime libéral. Aminata, Tahirou et vous êtes tous coupables devant la postérité.

A coté de ce plantage historique, il faut noter que Bakel Sare Demba a fortement régressé sur le plan du transport. La gare routière de Bakel ressemble plus à un garage d'une bourgade qu'à un carrefour départemental. Le trafic s'est fortement amoindri. Quelques minutes suffisent pour compter les voitures disponibles. Les passagers espèrent désespérément les transporteurs et subissent de plein fouet le dictat des "coxeurs". Pour information, "Thio" n'est plus de service. Son business s'est cassé la gueule. Avant, le trafic était tellement dense que les Bakélois se payaient le luxe de se faire courtiser par bon nombre de "coxeurs" dont le plus emblématique d'entre eux était Thiondy. Il suffisait de se signaler pour avoir une place et choisir son heure de départ. C'était la déferlante des voitures "sept places". L'offre était abondante. Souvent, à la limite de la légalité, les voitures chargeaient et reprenaient la route de Dial Diop Sangomar en quelques heures.

Aujourd'hui, le constat est amer. C'est le dictat de "AL AZHAR TRANSPORTS " sur l'axe Bakel - Dakar. Une société de transport privée détenue par la communauté Mouride. Je n'ai rien contre cette société. Au contraire, c'est une nouvelle offre de transports. Le hic se situe au niveau de la fréquence de départs. Pour un départ pour Dakar, les bakélois sont obligés de choisir entre ces trois jours : Lundi, Jeudi et Samedi. Un monopole qui ne dit pas son nom. Dans le circuit classique ( 7 places et autres mini-cars ), la fréquence est quasi nulle faute de transporteurs. Les prix et l'état des véhicules obligent souvent les passagers à se ruer vers les cars Al Azhar. Il faut s'inscrire trois à quatre jours avant son départ. A défaut, on vous placera sur les strapontins communément appelés " Versailles ". Ce monopole des " cars mourides " fait grimper également les tarifs sur le circuit classique. Même si son prix est très abordable. Sa fréquence de départ, ses horaires et le manque de confort dans ses véhicules desservent les Bakélois. Ils perdent plus qu'ils ne gagnent. Les fameuses sept places ne prennent la route de Dakar que sur commande, et à prix d'or. De Dakar, cela semble anodin, parce que la plupart des loueurs sont les émigrés ou des personnes nanties de Dakar. Mais au niveau local, cette situation devient alarmante. A titre d'illustration, je donnerai un simple exemple : Si vous avez un malade qui ne peut pas voyager à bord d' Al AZHAR aux fréquences habituelles, vous ne partirez qu'après avoir déboursé une centaine de mille de FCFA aux voitures sept ( 7 ) places. Combien de bourses bakéloises peuvent se payer ce luxe ? Chose insupportable ! Osez même pas espérer avoir une voiture à certaines heures pour rallier Dakar ou Tamba, vous dormirez à la gare routière à coup sur ! Je ne parle même pas du tronçon Bakel-Ourossogui- Saint Louis. C'est une galère inioue. Bakel est enclavé. Cet enclavement devient de plus en plus exécrable. Les populations subissent de plein fouet la baisse de l'offre dans le trafic interurbain.

L'effet pervers de ce monopole du trafic Bakel - Dakar est le chômage suffoquant. Autrefois, plusieurs familles avaient investi ce secteur avec des voitures en très bon état. Des gens de plusieurs villages du département étaient employés comme chauffeurs. Une manne financière conséquente qui rehaussait le niveau de vie de plusieurs familles Bakéloises. Aujourd'hui, demandez à Diabé Bathily, Abdou Dépé, Lassana Pouye ce qu'ils sont devenus ? La route Dakar-Bakel ne nourrit plus son chauffeur. Peut-être, ils ont investi d'autres secteurs, mais force est de noter que leur métier originel, jadis porteur, n'est plus d'actualité. Al Azhar est passé par là.

Dans le secteur du transport inter villages, c'est le fiasco total. Bakel est nostalgique de l'ère des Ousmane TAMBO, Modou Béré, Mamadou Seydou , Ali Concorde et Compagnie où l'offre était abondante et variée. Rallier le Goye inférieur n'était pas un parcours de combattant. Le trafic était dense et les départs très fréquents. Voyager était un plaisir tellement que ces chauffeurs étaient chaleureux et sérieux. Vers la fin des années 1990 au début des années 2000, un passager pouvait espérer trouver un véhicule pour rallier Tuabou à Gandé tard en fin d'après midi, voire en début de soirée. En effet, seul le Goye supérieur n'était pas très bien desservi dû à l'absence des transporteurs. Seuls quelques transporteurs exploitaient ce tronçon à des heures ponctuelles et les pirogues motorisées.

Mais, aujourd'hui se pointer à la gare routière de Bakel aux alentours de dix neuf heures garantit une nuit mouvementée dans les rues de Bakel. Aucun véhicule n'est disponible pour exploiter ce tronçon si ce n'est quelques transporteurs très irréguliers. Du coté du Goye inférieur, ce n'est pas non plus la joie. Je l'ai appris à mes dépens. Revenant de mon périple de Boundou (Kidira-Gabou), j'ai été faire quelques visites à l'intérieur de Bakel avant de rejoindre mon QG de Bondji ( RN 2 entre Bakel et Ourossogui ). Arrivé aux alentours de dix neuf heures à la gare, le constat fût amer. Aucun véhicule ne sortait pour rallier Ourossogui. J'étais à la merci des "coxeurs". Flairant le coup du " Parisien hébété ", ils commencèrent à me proposer des voitures "clandos" à des prix exorbitants. J'étais sidéré de voir des jeunes de Bakel avec qui je partageai les aires de jeux me prendre pour un fou. Un "coxeur" a même osé me proposer de me ramener en "moto Jakarta" pour le prix de 5000 FCFA alors que le tarif en transport en commun tournait autour de 700 FCFA. Incroyable ! C'est dire que les Bakélois même profitent de cette situation alarmante. Cela devient inacceptable. Bakel-Kidira ne déroge pas à la règle. C'est également un enfer. La rareté de l'offre de transport choque plus d'un. Seule embéllie, à l'intérieur de la commune, plusieurs clandos sont disponibles pour les courses. La course est à 500 FCFA. C'est une bonne chose pour les étrangers qui n'ont que leur adresse en main. Plusieurs jeunes de Bakel exploitent ce marché.

A coté de ce triste visage de Bakel, c'est le ruine des symboles de la commune qui estomaque. La préfecture de Bakel, anciennement fort pendant la période coloniale, est dans un état de dégradation très avancé. Les chats et les rats y dansent le " Worosso " ( Danse traditionnelle Soninké ) et le " Yéla" ( Danse Peule ) tous les jours sous l'œil moqueur des margouillats, des serpents et des termites. C'est une catastrophe ! A croire que Bakel refuse le progrès. A la sortie de cette bâtisse, un coup d'œil à la "place de l'indépendance" ronge le cœur de tout Bakélois fier. Place de l'indépendance, témoin de nos beaux souvenirs et des belles fêtes Bakéloises. Normalement, cette place devait être réhabilitée et transformée en jardin public. Sérieusement, combien couterait un jardin public à la municipalité de Bakel ? Même pas quelques deux petits millions, il suffit de refaire les murs et planter ça et là des arbres et des fleurs avec une petite touche décorative. Ce sera une embellie utile à la communauté. Ce n'est plus un luxe un jardin public dans une ville qui se respecte.

Aujourd'hui, la place de l'indépendance est le fief des badauds et des ânes. Autrefois, il servait de terrains de foot. Là encore, le constat est amer. En levant la tête vers le côté gauche, le visiteur aperçoit le fameux pavillon René Caillé, témoin de la riche histoire de Bakel. Ce pavillon croule sous le poids de la vétusté. Faute de rénovation digne de ce nom, il est aujourd'hui un lieu de défécation pour les jeunes badauds et des adultes égarés. L'endroit qui choque le plus à Bakel se situe au quartier HLM. Il s'agit rien d'autre que le très célèbre Lycée Waoundé N'DIAYE, jadis domaine de l'excellence. Aujourd'hui, ce lycée est en ruine. Le grillage qui servait de clôture est inexistant. Les fenêtres sont abimées. Les salles sont dans un piteux état. La vétusté et le manque d'entretien rendent les lieux inhabitables. Pire, le laboratoire, jadis salle imprenable, est aujourd'hui le domaine des talibés et autres jeunes badauds des quartiers périphériques. Les vases et les produits chimiques qui servaient aux expériences sont stockés en vrac dans un endroit de la salle rendant infecte les lieux. Les squelettes qui servaient aux cours de biologie sont recouverts de toiles d'araignées. Les quelques parties qui restent de ces éléments servent aux jeux des badauds. Incroyable mais vrai ! Le décor est inimaginable. Bakel est une cité perdue. Les habitants essaient vaille que vaille de vivoter. Ils survivent et tirent le diable par la queue. Bakel est réellement sous les cendres de l'oubli...Quel visionnaire était ce cher grand père, Ibrahima Diaman Bathily ! Paix à son âme !

Samba Fodé KOITA dit EYO pour www.bakelinfo.com , Récit de voyages sur les terres de mon enfance.